Un extraordinaire second volet
Une version modifiée de cette critique est parue dans le numéro 101 de Bifrost (si vous ne connaissez pas ce périodique : clic). Vous pouvez retrouver toutes mes recensions publiées dans le magazine sous ce tag.
Second volet du diptyque La mosaïque Sarantine, Le seigneur des empereurs fait suite à Voile vers Sarance. Il introduit un nouveau personnage, Rustem, un médecin Bassanien envoyé espionner Sarance, et qui, comme Crispin, est un autre étranger portant un regard extérieur sur les Sarantins. Un homme ordinaire placé, bien contre son gré, au cœur des intrigues tissées par trois femmes exceptionnelles pour s’emparer du pouvoir ou le conserver. Kay a toujours particulièrement soigné ses personnages, tout spécialement les féminins, mais il a probablement atteint ici le sommet de son art en la matière. S’il nous place au point où le paradigme bascule, où l’Histoire prend un nouveau cours, dans les pas des souverains et autres hauts personnages, il n’en oublie pas pour autant le sort des gens modestes. D’ailleurs, les scènes de plus grande envergure ne sont pas placées à la fin du roman, mais bien avant, et la conclusion met à nouveau en lumière l’art du mosaïste et celui qui lui donne vie.
Si la première partie (environ 240 pages) nous fait croire que le rythme restera aussi lent que dans le premier volet, la seconde, en revanche, fait s’accélérer les événements, réservant au lecteur ébahi des scènes d’une intensité dramatique absolument extraordinaire. Si Voile vers Sarance pouvait laisser penser que le diptyque pouvait relever, dans un monde imaginaire où le surnaturel est réel, d’une allégorie du règne de Justinien et de Théodora, dans l’Histoire réelle, Le seigneur des empereurs, en revanche, donne à ces personnages, ainsi qu’à l’équivalent de Bélisaire, un destin totalement inédit. Ainsi, la remarquable précision de la reconstitution de la Byzance de l’époque, jusque dans le comportement de ses souverains ou dans des citations à peine déguisées de L’histoire secrète de Justinien, par Procope de Césarée, est mêlée à un cours de l’Histoire différent, et bien sûr à des phénomènes magiques.
Voile vers Sarance était un bon roman pour qui connaissait déjà et appréciait Kay ; Le seigneur des empereurs est d’un tout autre niveau, hissant l’ensemble du diptyque à des hauteurs vertigineuses, dignes du meilleur de sa bibliographie (qui regorge pourtant de très grands romans de Fantasy Historique). On ne pourra que recommander à qui veut découvrir la prose du canadien de s’y intéresser (même s’il devra faire preuve de patience, tant la mise en place des dominos est lente -mais leur chute vertigineuse), et on conseillera même à ceux qui ne l’apprécient pas, d’habitude, de se faire violence, tant les événements d’une certaine nuit fatidique sont contés par l’auteur d’une façon extraordinaire, parfaitement servie par la remarquable traduction inédite de Mikael Cabon.
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J’avais commencé le premier en décembre, mais ça n’était pas du tout la bonne période pour le lire du coup je l’ai assez rapidement mis de coté.
Je ne compte pas l’abandonner, il faut juste que je trouve le bon moment pour le lire 🙂
En tout cas ton avis sur la suite me donne envie de lui trouver une place.
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Il y a une énorme différence d’intensité / rythme entre les deux. Pour le premier, il faut soit être fan de / habitué à la prose de Kay, soit ne pas être gêné du tout par les rythmes très lents (et être dans le bon état d’esprit, comme tu le soulignes). Le second, en revanche, a tout de la claque, quand Kay fait impitoyablement tomber les dominos qu’il a si soigneusement mis en place.
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J’ai de l’auteur sa saga Les chevaux célestes dans le viseur et j’avoue que ton avis me donne envie de vite découvrir cette plume et ce style qui semble t’avoir plus que convaincu avec ce second volet.
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Je connais bien le style de Kay, puisque c’est loin d’être le premier roman écrit par lui que je lis. Je me plaçais plus, dans l’article, du point de vue d’un néophyte qui ne saurait pas que chez le canadien, la mise en place et le rythme sont en général lents, voire très lents (à l’exception des Lions d’Al-Rassan, plus « nerveux »). Après, autant un rythme majestueux peut bien se prêter à un roman en un volume unique (et à une civilisation d’inspiration asiatique comme dans Les chevaux célestes), autant parfois, ça peut être VRAIMENT lent même si on est habitué à la prose de l’auteur. Et c’est vrai que dans le cas spécifique de ce diptyque, le contraste est encore plus saisissant entre Voile vers Sarance et (la deuxième moitié de) Le seigneur des empereurs.
Sinon, au cas où :
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Je ne peux commenter ta magistrale et étayée chronique des Chevaux Célestes qui me donne plus qu’envie de découvrir cette plume à mon tour ! D’autant plu qu’il ne reste que très peu d’exemplaires encore disponibles et il serait dommage que je passe à côté de tant de poésie 😉
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Ah oui, tiens, les commentaires étaient en effet verrouillés sur cet article, à cause d’un spammeur, de mémoire. Au cas où, je viens de les déverrouiller, au pire je les bouclerai à nouveau si j’ai un bot qui s’acharne sur cet article.
Et sinon oui, s’il ne reste que peu d’exemplaires physiques disponibles, il serait dommage de passer à côté.
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Bonjour! Je suis toujours tes recommandations et je n’ai jamais été déçue. Tu crois que je peux commencer la découverte de Gavriel Kay par la lecture de ce diptyque ? Je ne sais pas… Les Lions d’Al-ghassan m’attire aussi mais tes chroniques sur la mosaique sarantine sont vraiment convaincantes😊 Merci pour tes précieux conseils de lecture 👍😊
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Bonjour Najat ! Pour découvrir l’auteur, je te conseille plutôt Les lions d’Al-Rassan, à la fois parce qu’il est également excellent, qu’il est en un seul volume et surtout qu’il est plus « classiquement » rythmé. Il sera toujours temps de passer au diptyque sarantin ensuite 😉
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Ok merci Apophis ! Va pour les lions d’al-Rassan 😊
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Ping : In My Mailbox #48 – Maven Litterae
Vous m’avez fait envie. Je n’ai lu de cet auteur que la trilogie « La Tapisserie de Fionavar » que j’avais adoré mais cela date un peu. J’ai abandonné cet auteur et vous me donnez l’envie de le redécouvrir de manière plus actuelle. Merci.
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Avec plaisir ! La tapisserie de Fionavar est une œuvre « de jeunesse » qui, à mon humble avis, est loin de refléter la qualité de sa production postérieure en Fantasy Historique.
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Le premier tome est le premier Kay que j’ai pas aimé, donc je passe sur celui-ci et irai directement vers Les derniers feux du soleil :p
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Qui a d’ailleurs une couverture qui déchire 🙂
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Ping : Les Chevaux Célestes, tome 1 : de Guy Gavriel Kay – Maven Litterae