La fille aux éclats d’os – Andrea Stewart

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Un roman prévisible mais prenant, à l’univers original, et une précommande exceptionnelle

fille_éclats_os_stewartOn le sait, certains éditeurs sont capables de sortir la VF d’un roman en anglais avec un faible écart (quelques mois) par rapport à sa publication anglo-saxonne. C’est le cas de Bragelonne qui, le 5 mai 2021, nous proposera La fille aux éclats d’os, premier tome du cycle L’empire d’écume, et surtout traduction de The bone shard daughter d’Andrea Stewart, paru dans la langue de Shakespeare en… septembre 2020. On peut dire que ça n’a donc pas traîné, même si on a déjà vu des écarts plus faibles encore, que ce soit chez Bragelonne ou d’autres éditeurs, comme AMI par exemple.

Lorsque je vous fais ce genre de rappel de sortie en VF d’un roman que j’ai, pour ma part, lu en anglais, c’est soit pour vous signaler qu’il s’agit d’un livre à ne pas rater, soit, dans quelques cas, pour vous avertir que le soi-disant chef-d’œuvre vanté par l’éditeur est très loin d’en être un (de mon point de vue, du moins). Le livre de Stewart, sans être un monument de la Fantasy, est toutefois très recommandable, la question n’est donc pas là. Je voulais plutôt attirer votre attention sur le fait que La fille aux éclats d’os sort chez Bragelonne Big Bang, c’est-à-dire dans la collection Young Adult de l’éditeur. Et vu que les aponautes ne sont, en majorité, pas forcément des lectrices et lecteurs massifs de YA, d’après ce que je constate, je ne voudrais pas que vous passiez à côté d’un livre qui a bien des atouts pour vous séduire (sans compter que je ne vois pas trop pourquoi il a atterri dans une collection YA, mais bon…).

Celles et ceux d’entre vous qui veulent en savoir plus sur ce roman peuvent se référer à ma critique complète de la VO. Je signale aussi que l’éditeur propose de nombreux avantages liés à la précommande de l’ouvrage (vous trouverez tous les détails sur cette page de son site), ce qui explique que je fasse ce rappel de sortie en VF de façon un peu plus précoce que je n’en ai l’habitude (en général, c’est environ quinze jours avant), afin que celles et ceux d’entre vous qui voudront en profiter ne ratent pas l’occasion.

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The bone shard daughter – Andrea Stewart

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Prévisible mais prenant

bone_shard_daughterThe bone shard daughter est le nouveau roman d’Andrea Stewart, autrice sino-américaine vivant en Californie. C’est aussi le tome inaugural d’un cycle appelé The drowning empire. Il s’inscrit dans toutes les tendances de la Fantasy récente, à savoir proposer un cadre se démarquant de la pseudo-Europe médiévale qui a longtemps été cardinale dans le genre, un système de magie original et élaboré mais aussi un recyclage de tropes et d’influences… SF, tout en relevant pourtant incontestablement de la Fantasy (et de la Fantasy seule, hein, pas de Science-Fantasy ou je ne sais quoi).

Ce roman s’est révélé, au moins pour certains de ses fils narratifs (j’y reviendrai) vraiment très prenant, à la fois parce que l’autrice a su forger des personnages intéressants et / ou attachants, parce qu’elle a un style souvent (mais pas toujours) immersif et surtout parce qu’elle met en place toute une série de mystères ou d’interrogations, et que le lecteur lit avidement pour voir si les hypothèses qu’il a élaborées se révéleront fondées (ou pas). Pour tout dire, j’avais quasiment tout deviné, mais pourtant j’ai eu plaisir à voir mes supputations confirmées (et l’une d’elles infirmées !). Il n’en reste pas moins que le roman a quelques défauts, surtout concentrés sur certains personnages, et qu’une certaine prévisibilité (pour le vieux routard de la SFFF, du moins), pour ne pas dire une prévisibilité certaine, fait qu’il n’atteint pas tout à fait le niveau d’un (roman) Culte d’Apophis. Toutefois, je lirai avec grand plaisir les suites, car Andrea Stewart a eu l’intelligence de ne pas expliquer tous ses mystères à la fin de ce tome 1, et car l’opposition de deux personnages promet de très belles choses dans le tome 2. Lire la suite

The bone ships – R.J. Barker

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Ursula Le Guin (revue façon Dark Fantasy) + Patrick O’Brian = R.J. Barker !

bone_ships_barkerR.J. Barker est un auteur britannique, dont les deux premiers tomes de la trilogie Le royaume blessé ont été traduits en France par Bragelonne au moment où je rédige ces lignes (il faudra d’ailleurs que je me décide à lire le premier, mais ceci est un autre problème). The bone ships est son tout nouveau roman, et débute un cycle différent, appelé The Tide Child (du nom du navire qui est au centre de l’intrigue). Il s’inscrit dans une récente tendance, consistant, depuis la mort d’Ursula Le Guin, à proposer des univers de Fantasy inspirés par ou ressemblant à tel ou tel point de la saga Terremer, mais généralement avec une atmosphère très différente de celle des livres de l’autrice. J’aurai d’ailleurs l’occasion, en début d’année prochaine, de vous présenter un autre roman relevant de cette tendance émergente. Mais nous en reparlerons en temps et en heure. Pour l’occasion, j’ai créé un tag, Fantasy Le Guin-ienne, pour centraliser les romans plus ou moins inspirés par l’autrice (ou ressemblant en tout cas à son oeuvre), récents ou pas.

Mais revenons à nos moutons : si la ressemblance avec Terremer, qu’elle soit voulue ou fortuite, est incontestable, ce n’est pas la seule qui doit retenir l’attention. Car plusieurs éléments pointent aussi fortement vers Patrick O’Brian (R.J. Barker le citant d’ailleurs dans les remerciements), l’auteur de la saga de romans Historiques consacrés au personnage de Jack Aubrey (joué au cinéma par Russell Crowe dans le magistral film Master & Commander), depuis le surnom d’un des deux protagonistes jusqu’à l’ambiance, qu’elle concerne la vie quotidienne à bord d’un navire de guerre ou celle des combats. Mais je m’aperçois que j’ai presque oublié de vous mentionner un « détail » essentiel : si l’univers a un parfum Le Guin-ien, le traitement qui lui est appliqué est en revanche Dark Fantasy, et si nos héros sont à la barre d’un navire, celui-ci est fait… d’os de dragons des mers ! Inutile donc de vous dire que nous avons un worldbuilding qui, outre le fait qu’il soit très soigné, « claque » carrément, a une « gueule » terrible. Moorcockienne, presque. De ce point de vue là, le roman de Barker est donc une spectaculaire réussite. Toutefois, si je prends toutes les composantes de ce livre, il m’a manqué un petit quelque chose pour passer d’une bonne, voire très bonne impression d’ensemble, à un des romans « cultes » qui ont donné son nom à ce blog. Néanmoins, si vous êtes comme moi, et regrettez que la Fantasy maritime soit marginale, et / ou que vous souhaitiez voir un traitement Dark Fantasy de l’oeuvre phare (en Fantasy, du moins) d’Ursula Le Guin, voilà une lecture hautement recommandable ! Lire la suite

L’œil d’Apophis – Numéro 13

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Eye_of_ApophisTreizième numéro de la série d’articles l’œil d’Apophis (car rien n’échappe à…) ! Je vous en rappelle le principe : il s’agit d’une courte présentation (pas une critique complète) de romans qui, pour une raison ou une autre, sont passés « sous le radar » des amateurs de SFFF, qui sont sortis il y a longtemps et ont été oubliés, qui n’ont pas été régulièrement réédités, ont été sous-estimés, ont été noyés dans une grosse vague de nouveautés, font partie de sous-genres mal-aimés et pas du tout dans l’air du temps, sont connus des lecteurs éclairés mais pas du « grand public », pour lesquels on se dit « il faudra absolument que je le lise… un jour » alors qu’on ne le fait jamais, et j’en passe. Chaque numéro vous présente trois romans ou cycles : aujourd’hui, il s’agit de Black Man de Richard Morgan, L’essence de l’art de Iain M. Banks et du cycle Terremer d’Ursula Le Guin.

Au passage, sachez que vous pouvez retrouver les anciens numéros de l’œil via ce tag ou bien cette page. Je vous rappelle aussi que les romans présentés ici ne sont pas automatiquement des chefs-d’oeuvre ou ceux recommandés par le site à n’importe quel amateur de SFFF (si c’est ce que vous cherchez, voyez plutôt les tags (Roman) Culte d’Apophis ou Guide de lecture SFFF). Lire la suite

Le nom du vent – Patrick Rothfuss

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Improbable mais incroyable !

nom_du_ventLe nom du vent est le premier roman de l’auteur américain Patrick Rothfuss, ainsi que le tome inaugural d’une trilogie, Chronique du tueur de roi (et pour une fois, on est certain qu’elle ne se transformera pas en « trilogie en cinq volumes », pour des raisons que je vais vous expliquer plus loin). Il s’agit en fait du début de l’autobiographie de Kvothe, un aventurier, magicien et musicien légendaire devenu aubergiste (si, si). Il fait son récit à un scribe surnommé Chroniqueur, sur trois jours, chacune de ces journées correspondant à un des romans de la trilogie (vous comprenez donc pourquoi il est impossible d’étendre le nombre de volumes, comme c’est devenu l’énervante habitude ces derniers temps. Par contre, nous avons déjà eu droit à un spin-off, La musique du silence). Les tomes 1 et 2 sont d’ores et déjà parus (et traduits), tandis que le troisième se fait désirer.

Ce roman est précédé d’une grosse réputation. Malgré le fait que le palmarès de Patrick Rothfuss reste pour l’instant modeste en terme de prix littéraires prestigieux, son livre a eu un impact assez considérable. Cette aura est-elle justifiée ? Mais carrément, oui ! Lire la suite

Les Tombeaux d’Atuan – Ursula Le Guin

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Une digne suite du Sorcier de Terremer, aussi profonde, mais adoptant un surprenant point de vue

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Ce second tome du cycle de Terremer est, à mon avis, la digne suite du premier. C’est un roman comme les éditeurs n’en ont plus sorti jusqu’à une date récente (par exemple avec la collection Une heure-lumière proposée par Le Belial’), c’est-à-dire de moins de 160 pages. Aujourd’hui, on appellerait plutôt ça une novella (terme anglo-saxon, désignant un texte dont la longueur le place entre la nouvelle et le roman) ou un « roman court » (désignation française). Lorsque je l’ai acheté, en 91, les petits livres de Fantasy et de SF de ce type étaient nombreux, chez Moorcock par exemple. De nos jours, ils ne sont que rarement vendus séparément s’ils appartiennent à un cycle, mais plutôt sous forme d’intégrale réunissant une partie significative, voire la totalité, du dit cycle.

Si je parle de la longueur de ce tome 2, ce n’est pas par hasard. En général, on s’attend à ce qu’avec aussi peu de pages, le rythme soit soutenu. Après tout, il faut raconter toute l’histoire en moins de 160 pages. Ce n’est pas réellement le cas ici. Oui, l’histoire a un début, un milieu et une fin, mais non, le rythme n’est pas soutenu. Il y a une certaine accélération vers la pré-fin, on va dire (à part les derniers chapitres), mais rien de réellement trépidant, sauf sur un chapitre peut-être.

Non, en fait, s’il y a aussi peu de pages, c’est que, comme à son habitude, Ursula Le Guin ne donne pas dans l’inutile, ne tire pas à la ligne. Et pourtant, le rythme est très lent au début, et il ne se passe pas grand-chose de trépidant, on décrit essentiellement l’ennuyeuse vie quotidienne du protagoniste. Ce qui pourrait venir contredire le début de ce paragraphe, mais ne le fait pas : le but n’est pas d’électriser le lecteur, d’accrocher son attention, le but est d’installer une atmosphère, ce qui est très différent. D’installer une atmosphère ? « Eh, mais on la connaît l’atmosphère de Terremer, on sait tout de Ged, on a lu le tome 1 ! » devez-vous vous dire. Sauf que… Lire la suite

Le sorcier de Terremer – Ursula Le Guin

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Un roman fondamental en matière de Fantasy et de magie

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Ursula Le Guin, considérée, au moment où j’écris ces lignes, comme « le plus grand auteur de SF vivant », est aussi une légende de la Fantasy. Très prolifique et active depuis plus d’un demi-siècle, elle est titulaire d’un nombre impressionnant de prix, dont cinq Hugo, six Nebula et dix-neuf (!) Locus.

Le sorcier de Terremer, et plus généralement le cycle de Terremer tout entier, est à mon avis un de ces cycles fondamentaux que tout amateur de Fantasy, ainsi que tout amoureux de la magie, se doit d’avoir lu. Dans mon panthéon personnel, il se place aux côtés du Seigneur des anneaux parmi les œuvres les plus incontournables et les plus chéries. Si ce blog s’appelle « Le culte d’Apophis », c’est parce que je veux vous y présenter (entre autres) mes œuvres « cultes » en SF / Fantasy / Fantastique. En voilà une. Lire la suite