L’anthologie Apophienne est une série d’articles sur le même format que L’œil d’Apophis (présentation de trois textes dans chaque numéro), mais ayant pour but de parler de tout ce qui relève de la forme courte et que je vous conseille de lire / qui m’a marqué / qui a une importance dans l’Histoire de la SFFF, plutôt que de vous faire découvrir des romans (forme longue) injustement oubliés. Si l’on suit la nomenclature anglo-saxonne, je traiterai aussi bien de nouvelles que de novellas (romans courts) ou de novelettes (nouvelles longues), qui sont entre les deux en terme de nombre de signes. Histoire de ne pas pénaliser ceux d’entre vous qui ne lisent pas en anglais, il n’y aura pas plus d’un texte en VO (non traduit) par numéro, sauf épisode thématique spécial. Et comme vous ne suivez pas tous le blog depuis la même durée, je ne m’interdis absolument pas de remettre d’anciennes critiques en avant, comme je le fais déjà dans L’œil d’Apophis.
Dans ce onzième épisode, parce qu’on ne change pas une équipe qui gagne, nous allons reparler d’auteurs déjà abordés dans cette série d’articles, à savoir Robert Silverberg, H.P. Lovecraft et Alastair Reynolds. Sachez que vous pouvez, par ailleurs, retrouver les anciens épisodes de cette série d’articles sur cette page ou via ce tag.
Légendes de la forêt Veniane – Robert Silverberg *
* Living in the past, Riverside, 2011 (aaaah les deux dernières minutes…)
On trouve cette nouvelle dans deux ouvrages et sous deux titres différents : dans le recueil Le nez de Cléopâtre, dont je vous ai déjà abondamment parlé dans l’Anthologie Apophienne (et ce n’est pas fini tant il regorge de textes de valeur !), sous le nom Légendes de la forêt Veniane, mais aussi intégré au fix-up Roma Aeterna (cette fois sous le nom 2650 A.U.C. : Une fable des bois véniens), dont je vous ai là aussi parlé il y a trois ans dans le numéro huit de L’œil d’Apophis, et dont deux de mes blogueuses préférées, Lutin et Aelinel, vont vous entretenir très prochainement et en plus amples détails (et ce d’autant plus que la seconde possède une expertise de niveau universitaire sur le sujet). Cette nouvelle est, avec Tombouctou à l’heure du Lion, celle qui m’a fait découvrir l’uchronie et adorer ce genre littéraire (qui est mon deuxième préféré après la SF mais avant la Fantasy). En quelques dizaines de pages, elle brosse le tableau d’un monde fascinant, un dix-neuvième siècle alternatif où l’Empire romain s’est étendu sur toute la planète et règne depuis deux millénaires, de l’Amérique au Japon, de la Grande-Bretagne à l’Ethiopie. Silverberg va nous brosser à grands traits (qui seront énormément développés dans Roma Aeterna) l’Histoire de cette uchronie via deux enfants habitant en Pannonie (près de Vienne) et rencontrant, un jour, un étrange vieil homme dans un pavillon de chasse impérial abandonné en plein milieu des bois.
Légendes de la forêt Veniane est une très grande nouvelle uchronique, à la fois passionnante et idéale pour s’initier ou initier quelqu’un d’autre à ce genre littéraire. Je vous la recommande d’autant plus chaudement que les deux ouvrages où elle est comprise sont eux-mêmes de très haute volée, pour ne pas dire des incontournables en matière d’Uchronie (si vous ne connaissez pas ce terme ou ce registre littéraire : clic).
Les chats d’Ulthar – H.P. Lovecraft
Comparé à d’autres textes de Lovecraft, cette courte nouvelle (que vous pouvez retrouver dans une légion de recueils) pourrait paraître anecdotique, mais ce serait négliger le profond respect que l’auteur vouait aux chats, qu’il admirait pour leur indépendance, ainsi que l’importance que peuvent avoir nos prédateurs préférés ou la ville d’Ulthar dans d’autres ouvrages, comme La quête onirique de Kadath l’inconnue de ce même H. P. L. ou son récent négatif photographique (selon les mots mêmes de son autrice) progressiste, La quête onirique de Vellitt Boe, de Kij Johnson. Ce n’est qu’en ayant lu Les chats d’Ulthar que vous comprendrez en quoi le fait que le professeur Boe soit accompagné par un chaton noir d’Ulthar n’a absolument rien d’anodin !
J’aime beaucoup ce texte auquel (vous n’allez peut-être pas me croire…) je repense chaque fois que je croise un de nos nobles amis félins, à qui je voue un respect aussi sain que renouvelé depuis sa lecture xD L’anthologie apophienne concerne certes des nouvelles qui me paraissent des lectures indispensables à l’amateur d’imaginaire dans sa forme la plus noble, la courte, mais aussi mes coups de coeur personnels. En voilà un !
Vainglory – Alastair Reynolds *
* Vain Glory Opera, Edguy, 1998.
Vainglory est une nouvelle (en VO) signée Alastair Reynolds, et présente dans les anthologies Edge of Infinity (multi-auteurs) et Beyond the Aquila Rift (exclusivement consacrée à Reynolds). Elle raconte l’histoire de Loti Hung, sculptrice… d’astéroïdes, quatre-vingts ans, abordée sur Triton par un détective privé, qui vient lui parler d’un boulot effectué un demi-siècle plus tôt, et qui serait lié à l’impacteur de Naïade, une des autres lunes de Neptune. Loti va alors se souvenir de sa rencontre avec le milliardaire Skanda Abrud, et de la façon dont elle a réalisé pour lui (en partie involontairement) une œuvre d’art grandiose.
Je ne suis jamais déçu par la prose de Reynolds, et ce texte ne va pas déroger à cette tradition : il est tout simplement excellent. Sa narration, qui alterne entre présent et souvenirs d’un passé vieux de cinquante ans, est efficace, prenante, immersive, et réserve quelques surprises. Et quel sense of wonder ! Outre les merveilles liées à la colonisation du Système Solaire, la révélation quasi-finale est tout simplement grandiose. Bref, une excellente nouvelle, qui prouve, s’il en était besoin, qu’en matière de Hard SF et d’émerveillement, Alastair Reynolds n’a rien à envier aux Egan, Baxter et autres Watts, et qui mériterait vraiment une traduction (hein Monsieur Belial’…).
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Bien d’accord avec toi l’uchronie de Silverberg qui est au coeur de Roma Aeterna est fascinante et pour moi un ouvrage majeur de l’auteur.
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J’adore Alastair Reynolds et j’espère voir cette pépite traduite par chez nous.
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Oui, j’aime beaucoup cet auteur moi aussi.
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J’ai lu l’année dernière Roma Aeterna, ayant un intérêt assez grand pour l’Empire Romain et son héritage. Je vais suivre la parutions des articles sur les blogs cité, parce que j’avais été un peu déçu par le développement un peu trop mécanique de certaines d’entre elles, j’ai peut-être raté quelque chose à la lecture. Mais celle cité ici m’avait beaucoup plu, j’avais été vraiment touché par cette ambiance assez douce, loin des centres de pouvoir et des intrigues.
D’ailleurs j’en profite pour mettre Tombouctou à l’heure du lion sur ma liste !
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Oui, l’ambiance douce-amère de Légendes de la forêt veniane lui donne en effet une partie de son charme. Et vous verrez que l’atmosphère, pour le coup plus exotique, de Tombouctou à l’heure du Lion est aussi très plaisante et lui donne une partie non-négligeable de son attrait.
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Merci beaucoup pour la mention. Mes connaissances en Histoire Romaine datent un petit maintenant mais je tente tant bien que mal de combler mes lacunes en lisant des ouvrages récents sur le sujet. Complètement d’accord avec toi pour la nouvelle Légende de la forêt Véniane, ma préférée du recueil Roma Aeterna qui est d’ailleurs de grande qualité. Pour ma part, j’ai adoré ma lecture. On sent que l’auteur s’est bien documenté sur la période et qu’il a saisi l’essence même de ce qu’est la Romanité. Une grande uchronie.
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Pour Reynolds, ce serait peut-être même surtout « ohé ohé Monsieur le Vicomte ». Il me semble bien qu’il y a déjà du Reynolds traduit chez Bragelonne… Revenger, de mémoire. Mais bien évidemment, cela n’explique pas pourquoi ils ne sont pas en train de traduire Reynolds à tour de bras…
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