L’anthologie Apophienne est une série d’articles sur le même format que L’œil d’Apophis (présentation de trois textes dans chaque numéro), mais ayant pour but de parler de tout ce qui relève de la forme courte et que je vous conseille de lire / qui m’a marqué / qui a une importance dans l’Histoire de la SFFF, plutôt que de vous faire découvrir des romans (forme longue) injustement oubliés. Si l’on suit la nomenclature anglo-saxonne, je traiterai aussi bien de nouvelles que de novellas (romans courts) ou de novelettes (nouvelles longues), qui sont entre les deux en terme de nombre de signes. Histoire de ne pas pénaliser ceux d’entre vous qui ne lisent pas en anglais, il n’y aura pas plus d’un texte en VO (non traduit) par numéro, sauf épisode thématique spécial. Et comme vous ne suivez pas tous le blog depuis la même durée, je ne m’interdis absolument pas de remettre d’anciennes critiques en avant, comme je le fais déjà dans L’œil d’Apophis.
Dans ce sixième épisode, nous allons parler d’une nouvelle de Robert Heinlein, d’une novella d’H.P. Lovecraft puis d’une novelette en VO signée David Moles. Sachez que vous pouvez, par ailleurs, retrouver les anciens épisodes de cette série d’articles sur cette page ou via ce tag.
Vous les zombies – Robert Heinlein *
* All you zombies, The Hooters, 1982.
Après avoir parlé des deux autres membres (Clarke et Asimov) de la Sainte Trinité de l’âge d’or de la SF dans les épisodes précédents de l’Anthologie Apophienne, il était inévitable de dire un mot du troisième, à savoir Robert Heinlein. Et comment évoquer l’auteur dans le cadre d’un article dédié à la forme courte sans parler de sa nouvelle Vous les zombies ? Adapté il y a quelques années en long-métrage, nommé Prédestination, d’aussi bonne qualité que sa contrepartie papier, ce texte est un des plus fondamentaux pour qui s’intéresse au Time Opera. Je vais vous en dire le moins possible histoire, si vous ne l’avez pas lu, de préserver un maximum de surprises, mais vous pouvez me croire sur parole, c’est brillant. Convoluté, exigeant, mais vraiment brillant (si vous êtes curieux et si vous l’avez lu, jetez un coup d’œil au schéma sur la page wikipédia anglaise de ce texte…). La nouvelle (que l’on peut trouver dans les ouvrages suivants, dont le numéro 57 de Bifrost) commence en 1970, dans un bar, quand un homme, qui écrit, dans un magazine, de faux extraits de journaux intimes en se faisant passer pour une mère célibataire, raconte au barman qu’il n’est en fait pas vraiment un menteur : il est réellement une mère célibataire !
Les montagnes hallucinées – H.P. Lovecraft
Les montagnes hallucinées (connue dans certaines éditions françaises sous le titre alternatif Les montagnes de la folie, plus proche de la dénomination originale At the mountains of madness) est une novella signée H.P. Lovecraft, rédigée en 1931. Vous pouvez retrouver tous les ouvrages où elle est présente ici (sachant qu’il existe également une adaptation en BD par le mangaka Gou Tanabe). C’est un de mes textes préférés du gentleman de Providence, et un jalon capital dans sa bibliographie, puisque avec lui, son oeuvre prend un tournant science-fictif, s’éloignant du Fantastique et du Weird pur et dur.
Ce court roman décrit l’expédition menée par la célèbre (et tout à fait fictive) université Miskatonic en Antarctique en 1930, à cette époque un continent tout aussi mystérieux dans notre propre monde bien réel qu’il l’est dans l’univers Lovecraftien. Les savants y découvriront une chaîne de montagnes rivalisant avec l’Himalaya, une cité à l’architecture qui n’a rien d’humain, et surtout l’origine effroyable de… toute vie sur Terre ! D’ailleurs, dans ce registre de plongée dans l’abysse des temps géologiques et de découverte de la véritable histoire des formes de vie, hum, « terrestres », Les montagnes hallucinées est aussi fondamental et de bonne qualité que Dans l’abîme du temps, et je vous le recommande tout aussi chaudement (particulièrement dans sa superbe édition illustrée par François Baranger).
A soldier of the city – David Moles
A soldier of the city est une novelette (un texte d’une longueur comprise entre une nouvelle normale et une novella / un roman court) écrite par David Moles, et disponible (en VO) dans les ouvrages suivants. Ce qui frappe tout d’abord avec ce texte, c’est son contexte et son atmosphère absolument uniques : dans l’amas globulaire Babylone, une des cités (dont les plus modestes accueillent des dizaines de milliards d’habitants) orbitant autour du trou noir supermassif Tiamat est frappée par une attaque terroriste sans précédent. Sa déesse tutélaire, ainsi que la majorité de son armée, sont tués. Les soldats survivants, sous la conduite de l’époux de la divinité, vont exercer une impitoyable vengeance contre les Nomades responsables de la frappe.
L’auteur a mêlé de façon habile et étroite mythes et civilisation de Babylone avec un contexte au carrefour de la SF Hard, Transhumaniste et militaire, et le résultat est tout simplement fascinant. Voilà encore un texte court dont on regrettera amèrement qu’il n’ait pas été développé à la dimension d’un, voire plusieurs romans, tant ce contexte et son atmosphère très singulière avaient du potentiel, et se démarquent des gros bataillons de la SF inspirée par la civilisation occidentale et moderne, comme peut le faire dans un autre registre, par exemple, l’univers Xuya d’Aliette de Bodard.
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Elle est là 🤤
Ce sont les articles que j’attends le plus 😅
Même si souvent tu évoques des textes déjà lus 😉
Il me semble que pour « Vous les zombies », 2 traductions existent, et chacune nous fait appréhender différemment les derniers mots, j’avais lu ça sur l’Épaule.
Faut que je regarde ça d’ailleurs 🤔
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« Vous les zombies » est absolument truculente ! et ce schéma 🙂
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Oui, c’est un très grand texte, au sense of wonder hallucinant, et le schéma permet de se rendre compte à quel point Heinlein a rendu un scénario prodigieusement complexe tout à fait abordable pour son lecteur.
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Je viens de lire la version de Baranger des MOntagnes Hallucinées…. et j’ai envie de vite lire le tome 2. Les illus sont superbes (comme pour l’appel) et frnachement, je crois que le texte m’aurait noyée si je n’avais pas eu les images. La première partie est fort géo-descriptive on va dire.
Mais c’est vraiment une chouette découverte.
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Oui, c’est du super boulot. J’espère que Baranger va continuer à illustrer les autres grands textes de Lovecraft, parce que comme tu le soulignes, les dessins et le texte se nourrissent l’un de l’autre.
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