Soleri – Michael Johnston

Ce cycle est potentiellement une des nouvelles références de la Fantasy politique, à condition que les tomes suivants corrigent quelques erreurs de jeunesse

soleriMichael Johnston est un auteur américain vivant à Los Angeles. Cet architecte, qui a également étudié l’Histoire, a vu le germe d’une idée naître lors d’une conférence consacrée à l’Égypte antique. Ce passionné de Fantasy et de SF, natif de Cleveland, a vu cette idée croître lorsqu’il a déménagé en Californie et visité pour la première fois le désert. Il a mis un  terme à son activité professionnelle pour se consacrer à l’écriture de son premier roman (en solo, puisque il en a co-écrit deux autres), Soleri, qui a pour ambition de mêler Fantasy, Égypte et décisions politiques tragiques inspirées par Le Roi Lear (décidément à la mode en SFFF puisque la pièce jouait aussi un rôle dans le récent Station Eleven). Ambitieux, n’est-ce pas ? D’autant plus que vu l’énorme densité d’intrigues de cour, de complots et de mystère, le côté impitoyable de la chose, et l’inspiration adossée à un classique (Shakespeare ici, Maurice Druon chez Martin), difficile de ne pas faire la comparaison avec le Trône de fer (surtout avec des expressions du genre « The horned throne »).

Bref, le lecteur abordera forcément ce roman avec certaines attentes, et toute la question est de savoir si elles seront satisfaites. Pour ma part, je répondrai : pas totalement. C’est certes un roman impressionnant (surtout dans l’aspect intrigues politiques et l’impact de certaines scènes ou révélations -surtout celle de la dernière ligne-) compte tenu de la relative inexpérience de l’auteur, mais il cumule trop de maladresses pour totalement convaincre. Par contre, la suite (qui est en cours d’écriture), si elle corrige lesdites erreurs, pourrait bien s’imposer comme une des nouvelles références de la Fantasy politique.

Fantasy égyptienne

Dans ma récente critique de The killing moon de N.K. Jemisin, je vous expliquais à quel point s’inspirer de l’Égypte me paraissait périlleux : si on abuse des clichés, on tombe dans la caricature Hollywoodienne, tandis que si on est trop léger en éléments typiques et / ou surnaturels, on risque de paraître fade par rapport à d’autres auteurs ou par rapport aux attentes du public. Sauf qu’il y a des exceptions à toute règle, et Soleri en est une : l’atmosphère de l’empire qui domine ce monde est puissamment égyptienne, et pourtant il n’y a pas de pyramides, pas de crocodiles, et plus étonnant encore, il n’y a même pas d’équivalent strict du Nil (mais voir plus loin tout de même). Je crois bien que c’est la première fois que je vois une Égypte de Fantasy sans fleuve nourricier.

Bref, comment l’auteur fait-il cela ? Cela passe par différents éléments, les principaux étant les noms des personnages (Amunet, Kepi, Merit -en anglais, plusieurs princesses égyptiennes réelles s’appelaient Ahmose-Meritamun-, Geb, Seth), des souverains Soleri (Tolemy -Ptolémée-, Bes ou Re -comme les dieux du même nom-) des dieux (Amen Hen -Amon-, Horu -Horus-) des lieux (le domaine de Mithra-Sol s’appelle l’Atum -comme le démiurge de la mythologie égyptienne-) et des peuples (dont les Hykso -comprenez les Hyksôs-), la structure administrative (basée sur des Nomes), la mention des dynasties et d’un Ancien empire, un Moyen empire et un Nouvel empire, et bien entendu une écriture inspirée des hiéroglyphes. Bref, pas besoin de pyramides et de Nil, on peut faire très égyptien sans, malgré ce que le lecteur pourrait penser de prime abord. Et d’ailleurs, Soleri évoque bien plus puissamment cette civilisation que le roman de Jemisin ne le faisait.

Sachez cependant (voir plus loin) que l’inspiration n’est pas que égyptienne : il y a aussi des éléments chinois à Sola, et celtiques ailleurs, ainsi que des petites touches plus discrètes d’autres cultures encore.

Un point important à connaître est que ce roman ne présente aucune caractéristique traditionnellement associée à la Fantasy, et seul le fait que le contexte soit un monde imaginaire le rattache à proprement parler à ce genre : c’est même poussé encore plus loin que chez Kay, puisque outre l’absence de dragons (ou autres bestioles) et de races fantastiques, il faut ajouter celle de la magie. Du moins, c’est ce que le lecteur pense… jusqu’aux dernières pages ! (suivies, je le signale, d’un vaste glossaire).

Univers

Dans cette Fantasy en partie inspirée par notre Histoire mais se déroulant dans un monde imaginaire, l’équivalent de l’Égypte ancienne, Sola, a conquis les analogues de l’Europe et des îles de la méditerranée (notez d’ailleurs que le pays a des frontières terrestres avec ses voisins conquis). Sa dynastie, les Soleri, règne depuis avant même l’établissement des premiers calendriers, 2942 ans auparavant. Réputés être d’essence divine, les Soleri se marient entre eux (comme les Pharaons égyptiens, qui épousaient leur sœur), et ne parcourent leur royaume que le visage recouvert d’un masque d’or (coucou Toutankhamon). Ou du moins, ils le parcouraient jadis, car depuis deux siècles, ils se sont retirés dans une sorte de cité interdite à la chinoise, le Domaine Céleste, ceint d’un haut mur. Et d’ailleurs, dans une autre analogie de la civilisation de l’Empire du milieu, c’est le royaume tout entier qui est ceint d’une muraille impénétrable, le Dromus. Désormais, un seul homme, le Premier Rayon de soleil (First Ray of the sun), peut pénétrer les chambres secrètes des Soleri, et contempler leur éclat divin sans perdre la vie. Car même le soleil s’incline devant la puissance de cette dynastie : une fois l’an, la lune le masque invariablement depuis trois millénaires.

L’empire Soleri a mis en coupe réglée cinq autres royaumes, dont les deux principaux, Harkana (à l’est) et Feren (au nord), sont d’inspiration globalement celte, avec des touches nordiques. Non seulement la capitale, Solus, prélève un lourd tribut en nourriture et en esclaves, mais en plus les princesses des royaumes vassaux sont mariées selon le bon vouloir du dieu-empereur Tolemy (comprenez : Ptolémée) en fonction de ses intérêts politiques (pour éviter la constitution d’une alliance potentiellement dangereuse), et surtout les héritiers de leurs rois sont envoyés au Prieuré, une sorte de ville souterraine à la discipline de fer (sa philosophie : la douleur fait l’homme, tout un programme) dont on ne sort que si son père, voire toute sa famille, est mort. Ce système (qui assure, via ces otages, la tranquillité des royaumes inférieurs) est très subtil : insidieusement éduqués selon la coutume Sola dès leur plus tendre enfance, les héritiers deviennent en fait étrangers à leur propre peuple, qui, de fait, les méprise et est peu enclin à s’engager dans une aventure militaire sous leur direction pour prendre le contrôle de l’empire. En deux siècles, il n’y a eu que deux soulèvements : le dernier a eu lieu lorsque le roi Koren Hark-Wadi d’Harkana a refusé de livrer son fils Arko au Prieuré : sa résistance acharnée a permis d’aboutir à un compromis, et Arko a été éduqué parmi les siens. Par contre, lui a bel et bien envoyé son propre fils, Ren, dans la prison souterraine.

Je reviens sur l’aspect absence de Nil et nourriture : si le royaume sylvestre de Feren fournit une partie de l’approvisionnement, l’autre est obtenue grâce à une poudre fertilisante, qui rend le désert productif, issue de la plante sacrée des Soleri, l’Amaranthe (vous remarquerez au passage que l’importance rituelle de cette plante ramène à une source d’inspiration supplémentaire : les Aztèques). C’est le clergé qui contrôle la distribution des graines sacrées, et techniquement, ce sont elles qui servent d’équivalent au limon fertilisant du Nil (la question de l’eau par contre me laisse un peu perplexe). Sachez d’ailleurs que les végétaux en général ont un rôle majeur dans cet univers : outre ces graines, le bois d’un arbre appelé Blackthorn (épine noire) est aussi une ressource précieuse.

Tell me why i had to be a powerslave * (Intrigue et personnages)

Powerslave, Iron Maiden, 1984.

Il va être épouvantablement difficile de résumer l’intrigue, et ce pour plusieurs raisons : d’abord, parce qu’elle est extrêmement dense (il se passe beaucoup de choses dans un roman finalement modeste en taille), et ensuite parce qu’elle est très riche en révélations et coups de théâtre successifs (le plus colossal étant celui de la dernière ligne), ce qui fait que je vais éviter au maximum de spoiler (il n’y a qu’un spoiler mineur dans toute la critique, indispensable à sa rédaction). Vous me pardonnerez donc si je reste volontairement vague et n’entre pas dans les détails.

Sachez cependant que toute l’intrigue tourne autour des cinq membres d’une même famille, la dynastie royale d’Harkana, les Hark-Wadi (seules l’histoire et la renommée des Soleri sont supérieures à la leur) : le roi, Arko, sa femme, Sarra Amunet, devenue Pontife du dieu suprême, Mithra-Sol, à Solus, ainsi que leurs trois enfants, la belle et retorse Merit, la farouche et guerrière Kepi, et le pauvre Ren, l’héritier bouclé au Prieuré.

Arko (comprenez le roi Lear) va être convoqué devant Tolemy, ce qui signifie la mort car nul, à part le Premier Rayon, ne peut contempler l’éclat divin des Soleri sans périr. Avant de partir, il va prendre la décision funeste de nommer Merit, assoiffée de pouvoir, reine-régente, en attendant que Ren, son héritier, qui vient justement d’être libéré du Prieuré par Suten Anu (ledit Premier Rayon), ne rentre à la capitale.

La belle Merit (comprenez Goneril dans la pièce de Shakespeare ; 26 ans) va profiter de l’aubaine pour marier de force sa sœur Kepi au roi (usurpateur) de Feren, Dagrun, qui est en fait le co-conspirateur et amour de la manipulatrice princesse. Le but est de rapprocher les deux dynasties pour, un jour, jeter à bas la tyrannie des Soleri (histoire d’imposer la sienne propre, hein), et que Kepi serve de reine de façade en attendant que Merit puisse épouser sans contrainte le souverain. De même, elle va expédier son propre mari, Shenn, (juste une façade, lui aussi, un ami homosexuel qui ne la touche jamais et un autre co-conspirateur, qui plus est), pour tuer le jeune Ren avant qu’il n’accomplisse le rituel sacré qui fera de lui le souverain légitime. Hélas pour elle, ses plans machiavéliques ne vont pas toujours donner les résultats escomptés !

Kepi (traduisez Cordélia, d’autant plus qu’il s’agit d’un diminutif et que son vrai nom est en réalité Kepina ; 16 ans), après un premier mariage désastreux (heureusement court) avec un seigneur de Feren lorsqu’elle avait treize ans, va à nouveau se retrouver dans les griffes de l’un d’entre eux, et le roi qui plus est. Un homme réputé brutal. Les conséquences de la rencontre de la jeune femme, garçon manqué (elle en a la silhouette, contrairement à sa voluptueuse sœur) et guerrière redoutable (c’est dans le combat qu’elle cherche l’oubli de ses souffrances passées, notamment d’une année passée en prison à Feren), avec un faucon alors qu’elle est poursuivie par les barbares San seront surprenantes, tout comme le sera l’évolution de son appréciation de sa situation maritale…

Ren (13 ans) et certains des autres héritiers (dont son ami Adin) ne vont être libérés du Prieuré (pour des raisons mystérieuses, à part pour Ren, qui est chargé de transmettre à son père que le Dieu-Empereur Tolemy le mande, prenant ainsi la place d’otage de l’adolescent, en quelque sorte) que pour être mis en esclavage ou même subir des tentatives d’assassinat de la part de leurs propres familles, pas vraiment enclines à partager le pouvoir avec des quasi-étrangers. Ils vont alors tenter de réunir leurs forces, afin de reprendre les trônes qui leur reviennent de droit.

Sarra Amunet, enfin, est probablement la plus impitoyable du lot, pire encore que sa fille Merit. La Grande Prêtresse (qui ne croit pas en son propre dieu) va mener un jeu politique serré avec le Protecteur (comprenez : chef des armées, Shogun égyptien, si j’ose dire), Amen Saad, qui vient juste, selon la rumeur, d’assassiner son prédécesseur (qui se trouve être… son propre père) et est bien décidé à éjecter la flamboyante rousse de la course à la position de Premier Rayon, le titulaire actuel étant vieux et malade (l’Empereur étant un « dieu », le Rayon est le plus puissant humain de l’empire). Ajoutez à cela un rituel religieux qui tourne à la catastrophe et aux émeutes généralisées, ainsi que la sanglante rébellion du capitaine Barca (coucou Carthage !) et une énigme liée aux graines d’Amaranthe, et vous comprendrez à quel point Sarra va être occupée durant tout le livre. Surtout à envoyer des gens se faire tuer (à sa place, parfois : Saddam n’est pas le seul à utiliser des sosies), ou à distribuer joyeusement des rations empoisonnées aux scribes et aux ouvriers qui en savent trop.

Comme vous le constatez, l’intrigue laisse une place majoritaire aux personnages féminins, ainsi (et c’est à souligner) qu’à un personnage secondaire handicapé, une rareté en Fantasy (à part les aveugles, à la rigueur). Signalons d’ailleurs que les seconds rôles sont parfois bien moins insignifiants qu’ils n’en ont l’air de prime abord !

Il faut vraiment prendre le terme intrigue dans ses deux sens, à la fois la trame de l’histoire et les complots à l’intérieur d’une Cour royale ou les manœuvres politiques inter-royaumes. Et autant dire que les conspirateurs n’y vont pas avec le dos de la cuillère : personnages démembrés, brûlés vifs, battus à mort, empoisonnés, torturés, abandon de cadavres sur le pas de la porte de l’adversaire, contrefaçons d’ordres, de titres / positions et de documents officiels, c’est l’arsenal complet du salopard qui est déployé. Et encore, j’ai été surpris par la très faible place du sexe (pour ne pas dire inexistante) dans tout cela, tant je m’attendais à quelque chose de plus brutal et explicite à ce niveau là.

Dans un monde où l’ennemi et la famille ne font qu’un, les ennemis avérés se confondront parfois avec ceux imaginés, à cause de mauvaises informations (ou de leur absence totale), voire de manipulations : Ren se détournera par exemple de Kepi, sans jamais la voir, car il l’assimilera à Merit, ce en quoi il fait une erreur. De même, certains, comme Arko, accomplissent des actions aux conséquences funestes (qui tournent systématiquement autour de Merit) parce qu’au contraire, ils sont aveuglés par leur amour paternel, et ne savent pas déceler la soif de pouvoir chez leur propre progéniture, et les extrémités (pour ne pas dire atrocités) auxquelles cette dernière est prête à se livrer pour l’acquérir ou le conserver. La fille méprise sa sœur et sa mère, veut faire tuer son frère, et en veut à son père dont elle convoite la position. Mère qui déteste d’ailleurs son fils, qui finit par partager son sentiment après certaines révélations.

Mes problèmes avec ce roman (globalement très bon)

Soyons clair : c’est globalement un premier roman (en solo) bluffant, que ce soit au niveau de certaines scènes, de son ambiance, de son worldbuilding, de ses révélations ou coups de théâtre ou de ses prodigieux derniers 15-20 %. Sans atteindre la classe du Trône de fer, Soleri propose malgré tout une Fantasy politique de haute volée, peut-être bien une nouvelle référence dans le domaine. Du moins, il est possible que le cycle le soit, à condition d’éliminer certaines erreurs de jeunesse. De ce point de vue là, le pari, ambitieux, de l’auteur, est réussi.

Réussi, mais pas totalement cependant : il y a différents points de crispation (du moins pour ma part) qui l’empêchent d’atteindre le sommet tout en le tutoyant tout de même. D’abord, pour reprendre une expression très pertinente récemment vue chez mon estimé camarade blogueur L’ours inculte, le roman « raconte trop de choses pour son propre bien ». On est presque noyé, parfois, sous la densité d’informations casées dans un livre de taille largement inférieure au standard habituel. Dans un registre connexe, le fait que le point de vue alterne entre les cinq protagonistes fait qu’il est plutôt difficile de s’attacher à l’un d’entre eux, les choses bougent tout simplement trop pour cela. Et je ne parle pas des violents changements d’ambiance que cela entraîne, des égyptiens aux celtes, du désert à des forêts d’arbres géants…

Ensuite, si Arko et Merit sont solides et cohérents dans leur comportement, Kepi et Ren ont parfois des réactions illogiques ou des changements de cap de la girouette mentale qui laissent un peu perplexes. Sans parler de réactions à la limite du young adult parfois (alors attention, hein, globalement ce livre est à des kilomètres au-dessus du niveau pipi-caca, ne me faites pas dire ce que je n’ai jamais déclaré). Enfin, il y a le cas Sarra Amunet : si, globalement, c’est le personnage le plus complexe et sûrement le plus intéressant, il y a aussi un point qui m’a particulièrement agacé chez elle, à savoir le côté femme bafouée alors qu’elle fait saloperies sur saloperies quasiment du début à la fin du bouquin. D’ailleurs, c’est une tendance plus générale de l’auteur : il veut toujours compenser les vilenies de ses antagonistes par les souffrances qu’ils auraient vécues jadis. Mouais… tous les enfants battus ne deviennent pas des psychopathes, hein, il y en a même qui deviennent des modèles de bienveillance et d’altruisme !

J’ajouterais aussi le mariage de Kepi, qui ne me paraît pas très logique (même si c’est la fille cadette et pas l’héritier ou l’héritière du trône, il me paraît dangereux pour Sola de lier ainsi les dynasties de deux de ses royaumes théoriquement vassaux), l’absence de Nil et le coup des silos de graines (vous me pardonnerez de rester imprécis, c’est pour votre bien), et aussi le comportement de Saad : alors que Barca met les îles et le sud à feu et à sang, le Protecteur de Sola (chef des armées), au lieu d’assurer la sécurité de l’Empire, est plongé jusqu’au cou dans les intrigues politiques et passe son temps à amasser du pouvoir et des appuis. Pas très logique non plus, sachant que tout ceci ne servira à rien si le rebelle débarque à la capitale avec une armée de vétérans, et que de toute façon, la meilleure façon de se couvrir de gloire serait d’aller lui régler son compte tant qu’il est relativement faible ou désorganisé…

Enfin, au chapitre des maladresses mineures mais agaçantes, on relèvera la description détaillée et systématique, façon fiche S, de chaque personnage majeur lors de sa première apparition. Je rappelle qu’il y a deux manières de faire, dans ce domaine : celle là, et la bonne / intelligente. Un exemple : admettons qu’un des protagonistes soit un homme entre deux âges, aux cheveux noirs teintés de gris et aux yeux marrons. Vous pouvez le décrire comme je viens de le faire, en déballant tout d’un coup et de façon un peu hors de propos, cassant le rythme et donnant à votre lecteur une impression de lourdeur. Ou alors… vous pouvez glisser ça habilement, mine de rien, dans le cours de l’action. Par exemple, en disant « la lance du soldat ennemi frôla la sombre chevelure veinée de gris de Trucmuche, et sous l’effet de la colère, ses yeux marrons prirent alors la teinte sombre d’un ciel d’orage, dardant de terribles éclairs de haine ».

En conclusion

Dans un univers inspiré autant par l’Égypte antique que par Le roi Lear de Shakespeare, un monde en désintégration où famille et ennemi ne font qu’un, des intrigues politiques et de cour à multiples niveaux (des plans à l’intérieur des plans, comme dirait Mr Herbert) impliquant les Hark-Wadi et les Soleri feraient passer les Borgia et les Lannister pour une bande de petits bricoleurs du dimanche en matière de manigances et de vilenies. Ce cycle, caractérisé par ses révélations et ses retournements de situation chocs, sera peut-être une nouvelle référence de la Fantasy politique, à la condition impérative que le ou les tomes suivants (c’est encore peu clair : un autre est en cours d’écriture, mais le nombre de livres du cycle est à ma connaissance inconnu) gomment les maladresses présentes dans ce premier roman : densité et nombre de points de vue trop élevés, personnages parfois un peu bancals, lourdeurs dans l’écriture contrastant avec des passages éblouissants, dans une balade en montagnes russes sur le plan de l’intérêt (et des ambiances très différentes, du désert à la forêt et des égyptiens aux celtes) qui ennuie parfois, fascine à d’autres moments. Mais clairement, le potentiel est là, et il est énorme, et c’est avec beaucoup d’intérêt que je lirai la suite.

Niveau d’anglais : moyen.

Probabilité de traduction : traduit par Bragelonne sous le nom L’empire des Soleri, sortie le 17/10/2018.

Pour aller plus loin

Si vous souhaitez avoir un deuxième avis sur ce roman, je vous conseille la lecture des critiques suivantes : celle de Lianne, celle de Boudicca, de Xapur,

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25 réflexions sur “Soleri – Michael Johnston

  1. Celui ci me faisait de l’œil mais de loin, vu que je n’avais pas encore lu le moindre avis dessus.

    Du coup je pense que ça peut me plaire, à voir si j’ai le temps de le caser un jour.
    De toute façon je pense que j’attendais la sortie du tome suivant 😛

    Je n’ai jamais lu de fantasy basé sur un univers de type égyptien et ça me rend à la fois curieuse mais aussi très frileuse (essentiellement pour les raisons que tu as cité au début).

    Aimé par 1 personne

    • Il y a beaucoup de sorties intéressantes en VO sur fin juin / le mois de juillet, je trouve. Pas facile de faire le tri, effectivement, d’autant plus qu’il y a beaucoup de premiers romans et qu’on ne sait pas ce que vaut l’auteur(e) en général.

      J’aimerais quand même voir une Fantasy égyptienne avec UNE pyramide, là ça fait deux romans et pas l’ombre de ne serait-ce qu’une seule à l’horizon (et puis des sphinx, tant qu’on y est) 😀

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  2. Il y a tout de même pas mal d’éléments séduisants dans ce que tu nous en dit. Entre l’univers qui semble être fort recherché, une intrigue comme je les aime, une palanquée de personnages, j’ai l’impression qu’il est taillé pour des lecteurs comme moi!
    J’aime la difficulté d’ailleurs. Une question que je me pose, attendre ou pas une hypothétique VF?

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  3. Ça a l’air intéressant, effectivement. 🙂
    Par contre, contrairement à Lutin, je pense que ce n’est pas trop pour moi : je ne suis pas très « complots » (les coups de poignards dans le dos, c’pas trop mon truc ^^) et du coup j’ai déjà pris en grippe la majorité des personnages -à part le pauvre petit Ren, le faucon et pit-être Kepi.

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  4. Un roman court et ultra-dense… Ça me rappelle un des miens où je me suis trop emporté dans le nombre de personnages et d’intrigues politiques. Pour en revenir à la critique, un roman de fantasy sans magie, des fois ça fait du bien : après tout, on peut s’en passer dans le cas d’un monde secondaire, ce qu’oublient parfois les auteurs en créant des mondes bourrés de pouvoirs abracadabrants. Je me suis rendu compte un peu plus jeune que finalement la politique et les interactions sociales m’attiraient bien plus que les sortilèges. Bien que…

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    • En VO, si le style n’avait rien de remarquable (à part sur quelques passages) et que l’écriture présentait parfois des maladresses, je n’ai pas eu le sentiment que ledit style était atroce (par contre, j’ai tenté The winter road d’Adrian Selby, et là clairement, oui, il l’est : j’ai tenu quinze pages, et dans la douleur, effectivement…). Problème de traduction, sensibilité ou tolérance personnelle propre à chacun de nous deux ? Je ne saurais le dire.

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