The A(pophis)-Files – épisode 12 : It’s a kind of magic * – le Magicbuilding

* Queen, 1986.

afiles_3Le processus de création d’un univers de Fantasy, que ce soit pour un roman, un jeu de rôle, un comic / une BD / un manga, une série / un film, un jeu vidéo ou quoi que ce soit d’autre est nommé en anglais le worldbuilding, littéralement « construction du monde ». Un de ses multiples aspects (géographie, économie, géopolitique, systèmes de gouvernement, etc.) est le magicbuilding, qui concerne spécifiquement la magie (en SF, l’équivalent pourrait être l’explication sous-tendant l’éventuel voyage à une vitesse supraluminique). Le présent article se propose de détailler les questions essentielles qu’il faut se poser pour bâtir un magicbuilding digne de ce nom (balancer des tas de trucs sans rien expliquer n’a jamais constitué un magicbuilding, n’est-ce pas), et pourrait donc paraître avant tout destiné aux romanciers ou aux créateurs de jeux ; toutefois, il a aussi (et peut-être même surtout) été conçu pour donner aux lecteurs de ces oeuvres des éléments leur permettant d’analyser celui qui leur est proposé, sa richesse / complexité, sa cohérence, l’effort (ou pas…) mis à créer quelque chose d’original, d’intéressant ou d’élaboré. Un des buts de ce blog a toujours été de donner à ses abonnés une échelle comparative leur permettant de distinguer le bon grain de l’ivraie (compte tenu de leurs goûts personnels, bien entendu), et c’est très clairement un aspect de sa politique éditoriale que je vais désormais intensifier.

Certains, simples lecteurs ou même auteurs, balaient la chose d’un revers de la main. Selon eux, « Un roman n’est pas un jeu de rôle ! », « La Fantasy n’est pas la SF, on ne doit pas tout expliquer ! », « Cela tuerait le mystère et le merveilleux ! ». On rappellera, factuellement, que les passerelles entre romans de Fantasy et Jeu de rôle sont nombreuses (certains écrivains de SFF écrivant des jeux ou des suppléments -et la chose n’est pas récente : on se rappellera par exemple de Walter Jon Williams se chargeant notamment de l’adaptation de son propre univers cyberpunk pour le jeu éponyme-, tandis que d’autres commencent par le jeu de rôle avant de basculer vers l’écriture de romans) et concernent certaines des plus grosses pointures du domaine (ne serait-ce que Jean-Philippe Jaworski), ou que certains des auteurs ayant eu le plus grand succès ces dernières années, que ce soit au niveau mondial ou en France, sont justement caractérisés par et encensés pour leur magicbuilding de pointe (Brandon Sanderson, Robert Jackson Bennett et ses Maîtres Enlumineurs, etc.). Et concernant « Cela tuerait le merveilleux ! », lisez Terremer, notamment, pour avoir un magnifique contre-exemple… On rappellera aussi que certaines décisions sont cruciales si le projet est supposé s’inscrire dans un sous-genre bien précis (une hypothétique Urban Fantasy ne contenant aucune magie / créature surnaturelle ne relève en fait pas de ce registre…), et qu’au-delà du fait de ne pas passer pour un auteur feignant ou sans imagination, le magicbuilding peut générer une intrigue (si, si) en plus d’une explication de la présence de la magie dans votre monde (j’y reviendrai plusieurs fois).

Sommaire

Feel the magic in the air * :  le degré de magie dans votre monde

* Magic System, 2014.

La première décision à prendre est de décider si la magie sera inexistante (ou quasiment) dans votre univers, ou si au contraire elle sera très peu, peu, moyennement, très ou extrêmement présente. Cela permettra déjà de placer votre projet sur l’axe Low / High Fantasy, et donc de donner une idée plus claire du registre de l’imaginaire auquel il appartient. Le choix peut être affaire de goûts personnels de l’auteur, ou bien être au moins partiellement conditionné par les exigences de son projet : comme nous l’avons vu, difficile de faire de l’Urban Fantasy sans magie ou, plus généralement, sans surnaturel, donc sans anges, démons, loups-garous, vampires, etc. Ou alors cela ne relève plus vraiment des codes du genre, mais d’autre chose. De même, si votre intrigue a besoin d’une forme de magie particulière ou de créatures surnaturelles, ne serait-ce qu’un affreux sorcier / nécromancien qui fera office de méchant, il est difficile (mais pas impossible) d’instituer que la magie est extrêmement peu présente dans votre création (d’un autre côté, si votre méchant sorcier est le seul au monde à manier une vraie magie et que les autres font des tours de passe-passe, voire sont des charlatans, vous représentez une formidable menace alors que globalement, le postulat de départ est respecté au niveau global / mondial : la magie est en effet très, très peu présente dans cet univers).

Une question que certains d’entre vous peuvent légitimement se poser est : un roman estampillé Fantasy mais sans aucune magie ou créature surnaturelle relève-t-il vraiment de ce genre littéraire ? La réponse est clairement oui. D’autres facteurs peuvent rattacher le projet à la Fantasy, par exemple le fait que l’action se déroule dans un monde secondaire (imaginaire), la présence éventuelle de races non-humaines mais pas surnaturelles (Nains, Elfes, etc., mais pas de démons, par exemple), et ainsi de suite. Un excellent exemple est constitué par les romans de Fantasy Historique (d’une de ses variantes, du moins) de Guy Gavriel Kay, qui, à part le fait qu’ils ne se déroulent pas sur Terre (mais dans un monde très clairement calqué sur elle) et qu’il y a plusieurs lunes dans le ciel, sont extrêmement pauvres en éléments magiques ou surnaturels, à tel point qu’ils sont presque inexistants. Et pourtant, on est ici très clairement sur de la Fantasy, pas de la SF, pas de l’uchronie, pas du Fantastique, pas autre chose.

Sachez aussi qu’aucune réponse ne doit impérativement être monolithique, que ce soit dans le temps ou dans l’espace : dans l’univers commun aux jeux de rôle Earthdawn / Shadowrun, la magie est un phénomène cyclique qui disparaît puis réapparaît au bout de plusieurs milliers d’années, laissant tout le temps aux sortilèges et aux créatures surnaturelles de passer dans le mythe, la légende, le folklore, la superstition, bref d’être considérés comme imaginaires. Jusqu’à ce qu’on s’aperçoive un beau jour que, comme dirait Lovecraft, les étoiles sont à nouveau sont à nouveau propices, et que dragons, coatls et shamans maniant le pouvoir d’esprits d’une puissance terrifiante sont bien réels ! De même, la magie peut disparaître non pas à cause d’un phénomène cyclique et naturel, mais tout au contraire du fait d’une action ponctuelle et délibérée : dans L’Ultime Rivage d’Ursula Le Guin, la magie et la connaissance du langage de la Création qui la catalyse disparaît peu à peu du fait des actions d’un mage. En clair, un univers de Fantasy où le surnaturel est omniprésent, fondamental, se transforme, d’une certaine façon, en contexte médiéval « banal ». Enfin, la magie peut subir des cycles, des « marées », et non pas être présente / absente selon un effet on / off, mais présente en permanence mais à des degrés divers. En clair, de façon soit régulière, prévisible, ou au contraire complètement chaotique, vos magiciens peuvent avoir accès à de vastes pouvoirs, ou, quelques jours / années / décennies / siècles / millénaires plus tard, être réduits aux plus basiques des incantations.

Le degré de magie de votre contexte peut aussi être structuré de façon non pas temporelle, mais spatiale : si je reprends le dernier exemple, il peut être non pas variable dans le temps et au niveau mondial, mais selon la zone de votre monde. Certaines seront très riches en magie, d’autres très pauvres, d’autres encore se trouveront entre ces deux extrêmes. On peut par exemple imaginer que la magie transite selon des lignes d’énergie invisibles, se comportant comme le fait l’eau, qui s’écoule en ruisseaux, rivières ou fleuves. Si une nation est traversée par l’équivalent magique de l’Amazone, certaines de ses régions seront richissimes en magie, tandis que certains des royaumes voisins devront se contenter de maigres ruisselets de puissance occulte. Ce genre de choix structurant un peu plus celui, général, du degré de magie (presque inexistant, très faible, faible, modéré, etc.), influe aussi à la fois sur le reste du worldbuilding et, encore plus intéressant, peut influer carrément sur l’intrigue du projet : cela peut expliquer, par exemple, pourquoi une école de magie, ou la tour d’un effroyable nécromant, est bâtie dans un endroit improbable / lointain / retiré / dangereux, tout simplement parce qu’on y trouve un « fleuve » de Fluide magique qui permet d’alimenter autant de sorts ou d’artefacts que l’on veut, y compris les plus gourmands en puissance. De même, cela peut expliquer pourquoi telle ville est plus importante que telle autre dans votre univers (de façon classique, les cités les plus florissantes ont des ports en eau profonde, sont au carrefour de routes commerciales importantes, sont des lieux de pèlerinage essentiels dans la religion dominante, et j’en passe) : située à la croisée de plusieurs veines arcanes / lignes de force / lignes cosmo-telluriques, la métropole en devenir attire tous les jeteurs de sorts à des centaines, voire des milliers de kilomètres à la ronde, la Silicon Valley de la Thaumaturgie.

Une autre facette modulant le niveau de magie global du monde est le degré avec lequel vous allez expliquer (ou pas…) comment marche la magie, pourquoi il y en a éventuellement plusieurs sortes (ou une seule, mais qui marche différemment selon les âges, le genre, la race -humain, elfe, etc.), pourquoi certaines peuvent l’utiliser et d’autres pas (Enseignement, pouvant potentiellement faire de n’importe qui un mage ? Don naturel impossible à développer chez quelqu’un qui en est dépourvu ? Signe d’une hérédité surnaturelle -voir plus loin- ?), et ainsi de suite. Sachez que contrairement à ce que vous pourriez intuitivement penser, il existe des univers de Fantasy qui regorgent de magie(s), mais où l’autrice ou l’auteur ne s’embarrasse pas d’explications. Personnellement, je pense que si la chose était acceptable jusqu’aux années 50, voire 60, elle ne l’est clairement plus dans les années 2020. D’autant plus quand on voit ce que proposent les Sanderson et compagnie. Bien sûr, libre à chaque auteur de faire comme il l’entend et à chacun de dépenser son argent et son temps de lecture comme il lui sied. Si vous suivez ce blog depuis longtemps, vous connaissez ma position sur cette question : le worldbuilding / magicbuilding est ce qui m’intéresse le plus en Fantasy, et il faut vraiment que les autres composantes d’un livre ou d’un manuel de jeu de rôle soient extrêmement solides pour compenser de grosses lacunes ou faiblesses sur ce plan.

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Distinguer les sources et les formes de magie

* Sorceress, Opeth, 2016.

Avant de commencer à chercher une explication sur la provenance / source de la magie, il faut décider si dans votre univers, il faut parler de magie au singulier… ou au pluriel. Et dans ce dernier cas, différentes formes de magie peuvent provenir de sources différentes (voir plus loin), ou d’une seule mais qui se décline en différentes variantes. Prenons trois exemples : premièrement, la magie est, à la base, la possibilité de contourner ou de dépasser les lois naturelles et donc, de créer des effets surnaturels au sens premier du terme. L’auteur peut décider qu’elle consiste en la manipulation d’une énergie qui est un résidu de la création de l’univers à partir du Chaos primordial. Cette énergie (ou parfois la radiation qu’elle dégage) porte, en Fantasy, une grande variété de noms, comme Fluide, Mana, Heka, Octarine, etc. Dans un monde où ce serait la seule source de magie (un monde où les dieux n’accordent pas de pouvoirs mystiques à leurs prêtres, par exemple, voire où les dieux n’existent pas), la manipulation du Fluide pourrait cependant prendre différentes formes, celles, classiques dans les romans et les jeux de rôle de Fantasy, de différentes « écoles » ou « techniques / voies » comme la Nécromancie, la Divination, l’Invocation, et j’en passe. Deuxièmement, il peut exister une magie blanche et une magie noire, en fonction non pas de ce qui les alimente (dans tous les cas, ce sera le même Fluide) mais de l’intention sous-jacente, faire le bien ou le mal. Troisième exemple, on peut imaginer que le résultat de l’utilisation du Fluide diffère tout simplement selon le genre ou l’espèce du magicien : la magie féminine pourrait différer de la masculine (la première pourrait par exemple être orientée vers la création et la préservation, la seconde vers la destruction… ou inversement : les sorcières ont mauvaise réputation, pas vrai ? À tel point que dans Charmed, on se sent obligé de préciser « Oui, mais ce sont de bonnes sorcières ! »), celle d’un elfe être complètement différente de celle d’un Nain, alors qu’à la base, ils emploient la même source de pouvoir (le Fluide).

Bien entendu, plus le nombre de sources sera élevé, plus votre monde sera riche, et plus des idées de scénarios pourront spontanément émerger de la simple mise au point du magicbuilding ; le corollaire étant que vous devrez fournir au moins un embryon d’explication au fait qu’il existe différents types de pouvoirs magiques dans votre création.

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Quelques exemples de sources de magie

* Five Magics, Megadeth, 1990.

En faisant une synthèse des traditions magiques du monde réel et de celles des univers de jeu de rôle ou de romans de Fantasy les plus connus, intéressants ou originaux, on peut dégager un certain nombre, pour ne pas dire un nombre certain, de sources de magie / pouvoirs surnaturels possibles (notez que les termes employés entre guillemets relèvent de ma conception personnelle de la magie et peuvent avoir d’autres sens dans des contextes autres que celui de cet article)  :

  • La magie « arcanique » : le magicien utilise une énergie qui est un résidu de la création de l’univers et qui, donc, transcende les lois de ce dernier, et / ou il apprend le langage de la création (qui peut prendre la forme d’un chant) pour modifier ou contrôler celle-ci. C’est le cas le plus courant en Fantasy, par exemple dans Terremer. La manier peut être le résultat d’un don naturel et instinctif (« Thaumaturgie ») ou d’un enseignement, avec même certains contextes où les deux formes existent (par exemple, celui qui est né avec le Don de manier le fluide peut manifester spontanément sa magie dans son enfance ou adolescence, notamment en cas de danger ou de stress intense, puis subir plus tard un enseignement formel, théorique ou pratique, pour canaliser ce pouvoir : cf. Ged dans Terremer d’Ursula Le Guin, une fois encore).
  • La magie divine ou « Théurgie » : la magie vient des déités, qui l’accordent à leurs fidèles serviteurs dans le monde mortel / matériel, les prêtres. Une question intéressante est de savoir d’où les divinités elles-mêmes la tirent : elles peuvent très bien employer elles-mêmes le Fluide, mais d’une façon incomparablement plus massive, efficace ou subtile que les mortels, tirer leur puissance du nombre et de la foi de leurs adorateurs, et ainsi de suite.
  • Les pouvoirs psychiques / psi ou « Mentalisme / Psychurgie » : le cerveau humain (ou elfe, nain, etc.) recèle une puissance intrinsèque clairement distincte des forces extérieures comme le Fluide ou les divinités, mais capable de faire plier l’univers à sa volonté de la même façon.
  • La magie Naturelle (ou, comme le dirait Ursula Le Guin, la « magie des Puissances de la Terre« ) : c’est celle qui émane de la Nature, qui n’est pas personnifiée par une divinité particulière mais dont l’énergie mystique, la Mana, peut tout de même être canalisée par des « druides » ou équivalent. Notez que comme les forces naturelles peuvent être aussi bien bénéfiques (pluie permettant aux cultures de croitre, etc.) que destructrices (avalanches, tremblements de terre, épidémies, etc.), on peut très bien imaginer des « druides noirs » (l’équivalent des sorciers maléfiques de la magie des Fluides) aussi néfastes et malveillants que le pire des nécromanciens, surtout envers les races qui ont tendance à détruire la Nature pour leurs besoins industrieux (Nains, Orcs, etc.). La légendaire série de « Livres dont vous êtes les héros » Loup Solitaire offre d’ailleurs un bel exemple de la chose.
  • La magie des Pactes / « Goétie » : le magicien possède certains pouvoirs parce qu’ils lui ont été prêtés par une puissance surnaturelle avec laquelle il a signé un pacte. La nature de ladite puissance peut varier (pacte avec le Diable, sabbat démoniaque, djinns arabes, élémentaires -représentation vivante des éléments comme le feu, l’eau, la terre, l’air, le métal, etc. -, esprits tutélaires des animaux -cf. le Livre dont vous êtes le héros Le Marais aux scorpions, le cycle d’Elric de Michael Moorcock-, les esprits amérindiens ou asiatiques, etc.), tout comme le côté néfaste du Pacte pour celui qui le lie. Dans certains cas, on ne peut nouer de pactes, voire de pacte au singulier, qu’avec un seul type d’entité, voire une entité unique et aucune autre de son espèce ; dans d’autres (Elric), le magicien peut se doter d’un vaste arsenal de pouvoirs très divers en cultivant l’amitié et en nouant des partenariats mutuellement bénéfiques avec une vaste gamme de puissance occultes.
  • La magie intrinsèque : certains individus peuvent faire preuve de capacités surnaturelles tout simplement parce qu’ils ne sont pas humains, ou pas entièrement. Leurs pouvoirs ne résultent pas (du moins pas directement) de la manipulation de forces, qu’elles soient externes ou internes, mais de leur nature même. Par analogie avec les univers de super-héros, ces individus peuvent par exemple être une variante d’un individu standard de leur race (un « mutant »), impossible à distinguer de ce dernier, capable de se reproduire avec lui, mais possédant un Don surnaturel qu’ailleurs, on appellerait un super-pouvoir, ou bien qui lui permet de reproduire les effets de certains sorts arcaniques, théurgiques ou autres. Dans d’autres contextes de Fantasy, le magicien a dans sa lignée plus ou moins lointaine un être surnaturel, et c’est son essence qui lui confère son pouvoir. Un exemple très connu est celui de Merlin, réputé être le fils d’une vierge et d’un démon, voire du Démon, expliquant ainsi une partie de son immense pouvoir, surtout dans un univers où les mages hommes sont la plupart du temps faibles et où, au contraire, les plus grands jeteurs de sorts sont des femmes (Nimue, Morgane, Morgause, etc.). Deux autres exemples connus viennent du Seigneur des anneaux : d’une part Gandalf, Saroumane et Radagast sont des magiciens parce que ce sont en fait des Maiar, des êtres que l’on pourrait qualifier d’essence divine, et d’autre part les cordes ou les capes données aux hobbits par les elfes de la Lorien paraissent magiques aux premiers précisément parce qu’elles n’ont été fabriquées par nuls autres que les seconds ; c’est la nature même des elfes qui confère à certaines de leurs créations (ces deux-là, le miroir de Galadriel, les anneaux de Celebrimbor, les palantíri et les silmarils de Fëanor, etc.) leurs pouvoirs. Enfin, si Wilbur Whateley peut invoquer un des trois dieux les plus puissants du mythe de Cthulhu, c’est parce qu’il contient en lui une certaine part de son, hum, Extériorité.
  • La magie tirée d’une ou plusieurs substances : on serait tenté de la désigner sous le terme d' »alchimie », mais des auteurs à l’imagination fertile en ont imaginé un tel nombre de variations que ce domaine est loin de s’arrêter à la combinaison de diverses substances pour créer ou catalyser un effet magique. Car la substance en question peut être constituée par des pierres précieuses ou des cristaux particuliers, un métal tombé des étoiles, le résidu coalescé de terribles conflagrations magiques, une / des « épice(s) » très spéciale(s) (Bloodlust, inspiré par Dune), et j’en passe. L’important est de retenir que sans cette substance ou combinaison de composants, le mage est soit beaucoup plus faible, soit sans pouvoir… du tout. Des auteurs comme Brandon Sanderson ou Brian McClellan ont excellé dans ce domaine.
  • La magie transdimensionnelle : au-delà de l’univers matériel, existent d’autres « dimensions » (en Fantasy, on parle plutôt de « Plans » d’existence), dont les lois physiques diffèrent des nôtres. Certains individus sont en « résonnance » avec un de ces Plans, et sont capables d’ouvrir un « seuil » qui y mène. Dès lors, ce sont les lois de cet espace qui s’appliquent dans un certain rayon et pendant une certaine durée, pas celles de l’univers « normal ». C’est ainsi que le mage est capable de griller son adversaire avec un éclair ou une boule de feu, parce qu’il a pu générer un effet surnaturel via l’application temporaire de lois physiques différentes. Le roman The Malevolent Seven de Sebastien de Castell offre un très bon exemple de ce type de système de magie. Une variante de cette source de magie est que le seuil dimensionnel n’est pas ouvert par le mage, ni transitoire, mais est permanent et s’est ouvert naturellement ou a été ouvert par quelqu’un d’autre, et est permanent ou en tout cas de très longue durée (là aussi, on peut imaginer des cycles où le portail est ouvert / fermé, ou plus ou moins ouvert, laissant passer une quantité variable d’énergies extraplanaires). Il fait souffler sur le monde des « vents de magie » (Warhammer Fantasy) que certains peuvent capter pour lancer des sorts.
  • La magie des éléments : le magicien a une affinité particulière avec un des éléments comme le feu, l’eau, la terre ou l’air, qu’il peut manipuler à sa guise pour créer des effets surnaturels. Notez que même dans le monde réel, la liste des éléments ne s’arrête pas là, puisqu’elle peut ajouter ou substituer aux quatre traditionnels d’autres comme le bois ou le métal. Certains contextes de jeu de rôle, comme Rolemaster par exemple, vont encore plus loin, considérant comme des éléments (au sens mystique du terme) des choses comme le magnétisme, le Temps, l’électricité, la glace, et ainsi de suite. Notez que vous pouvez bâtir une explication (science-)fantasy qui tient facilement la route en expliquant que le magicien a en fait un contrôle soit d’une des phases de la matière, soit d’une des forces fondamentales de l’univers (l’aquamancie est en fait un contrôle des liquides, la pyromancie des plasmas et de l’énergie thermique / l’agitation atomique et moléculaire, l’électromancie du magnétisme et de l’électricité, et ainsi de suite). Et justement, puisqu’on parle de cosmos… Notez qu’il s’agit d’une excellente occasion de recycler, en fantasy (voire en Steampunk), des théories physiques désuètes du monde réel, comme celles de l’éther (comme l’a excellemment fait le jeu de rôle Space 1889) ou de la Phlogistique pour bâtir à peu de frais un système doté d’une relative cohérence interne.
  • La magie cosmique : vous pourriez aller bien plus loin que le postulat intrinsèque de la magie Naturelle, qui est que le mage / druide tire son pouvoir de la Terre (ou quel que soit le nom de votre planète fictive), et instituer que le magicien peut tirer des facultés surnaturelles du cosmos dans son ensemble, par exemple faire une vraie divination en lisant les configurations astrales, faire pleuvoir non pas des boules de feu mais des météores sur ses ennemis, capter la gravitation des étoiles pour les écraser (littéralement), ouvrir des passages entre deux régions éloignées de l’espace pour se téléporter, etc. C’est, en gros, une version aux effets plus variés (et parfois plus puissants) de la Magie Naturelle ou de la Magie élémentaire. Notez que dans certains contextes, la magie peut aussi être influencée par les phases de la ou des lunes ou par certains alignements cosmiques rares (comme le dit Lovecraft, « Quand les étoiles sont propices »).
  • La magie du sang / des âmes : c’est le sang ou l’âme d’un individu qui contient une puissance qui peut être employée pour lancer des sortilèges, le plus souvent parce que cet élément lui est arraché par le jeteur de sorts, qui le saigne ou le sacrifie et / ou lui vole son âme, parfois, dans ce dernier cas, pour la stocker dans un quelconque objet (une gemme / un cristal dans les jeux de la série Elder Scrolls, par exemple), qui sert dès lors de réservoir d’énergie, un peu comme une version mystique d’une batterie dans un contexte scientifique / science-fictif. Notez que c’est évidemment une des formes de magie les plus susceptibles de vous attirer l’ire des autorités, avec la sorcellerie des mages noirs. Notez aussi qu’il ne faut pas la confondre avec la Nécromancie employée par un mage arcanique, utilisant le Fluide et pas l’énergie vitale / spirituelle contenue dans le sang / l’âme.

Il existe un bien plus grand nombre de sources de magie (les rêves, la lumière, des techniques d’arts martiaux, etc.), mais elles sont bien moins fréquentes dans les univers de Fantasy que celles décrites ci-dessus. Je présenterai d’ailleurs dans l’avenir un guide de lecture de romans de Fantasy possédant des systèmes particulièrement intéressants et / ou originaux.

Notez aussi que dans certains univers, un système de magie ou un individu peuvent combiner / comprendre plusieurs de ces sources : La Promesse du sang de Brian McClellan en propose quatre différents, et Soul of the world de David Mealing trois, parfois subdivisés en différents sous-types ! De même, Merlin a des pouvoirs tirés de différentes sources, dont son ascendance démoniaque, son étude de la magie arcanique, des pouvoirs « druidiques », etc. À vrai dire, on serait tenté de dire (au doigt mouillé) que les mondes qui ne proposent qu’une source unique de magie semblent bien plus rares que ceux où plusieurs cohabitent (ne serait-ce que des mages « profanes » et des prêtres). Notez d’ailleurs que cela nous conduit à une question connexe : si un « mage » peut combiner plusieurs sources de magie, peut-il aussi combiner art des arcanes et maîtrise des armes ? Les jeux de rôle (et les jeux vidéo) répondent majoritairement « non » à cette question, sauf dans ceux où le joueur peut distribuer des points dans les compétences de son choix (avec éventuellement un coût qui dépend de sa profession / classe : un magicien pourra manier efficacement l’épée, mais en investissant bien plus de points qu’un guerrier qui, à l’inverse, aura du mal à apprendre la magie) et donc jouer un rôle hybride jeteur de sorts / guerrier. Du côté des romans, la réponse est moins claire : cela dépend des univers. On remarquera par exemple que Gandalf manie régulièrement l’épée.

Notez enfin que quand, en tant qu’auteur, vous forgez votre magicbuilding, vous pouvez combiner deux des sources précédentes pour en faire une seule ; en voici un exemple : dans votre monde, la seule forme de magie qui existait était fournie par les dieux à leurs prêtres, selon leur bon vouloir. Mais les dieux (ou au moins un / des panthéons bien précis) se sont affrontés dans une titanesque bataille… et se sont entretués. Leur sang répandu sur Terre et / ou le considérable dégagement d’énergies divines impliqué par cette conflagration a contaminé l’environnement, que ce soit localement ou au niveau planétaire. Certains êtres exposés à cette substance / ce « rayonnement » développent alors un pouvoir magique propre, ou bien sont capables d’en employer un tant qu’ils ont accès à cette substance (mais le perdent sans elle). Selon les choix faits, ce système hybride peut combiner Théurgie + magie des substances ou Théurgie + magie intrinsèque (« mutation » ou « filiation divine »).

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Qui peut utiliser la magie ?

* You can do magic, America, 1982.

Une fois vos sources de magie, le degré de magie global, et le mécanisme sous-tendant ces sources choisis, le travail du « magicbuilder » est loin d’être terminé. Il faut en effet commencer par déterminer qui peut utiliser telle sorte de magie : tout le monde (toutes les races – humains, elfes, etc. -, tous les sexes, etc.) ou pas (n’importe qui ou seulement certains individus ayant un don, seulement ceux qui ont été autorisés à le faire – prêtres vs profanes -, seulement ceux qui ont reçu un enseignement en la matière, et ainsi de suite). Ensuite, il faut choisir si au sein de chaque source, il y a une seule forme ou plusieurs, et là encore, déterminer qui peut pratiquer telle ou telle forme… ou pas : tous les sorts de magie arcanique sont-ils enseignés par toutes écoles, ou la Guilde des Nécromanciens garde-t-elle aussi jalousement ses secrets que celle des Illusionnistes ? Faut-il payer une cotisation annuelle aux Maisons de Guérison pour avoir le droit de faire usage de magie curative tout comme il faut payer une cotisation annuelle à l’Ordre des pharmaciens pour avoir la possibilité d’exercer l’art de l’apothicaire ? Le Fluide donne-t-il les mêmes effets s’il est « forgé » par un homme ou par une femme ? Un des deux sexes a-t-il seulement le droit de pratiquer la magie ? Après tout, dans le monde de La Roue du Temps, la magie masculine est anathème, tandis que dans celui de Terremer, les femmes n’ont pas le droit de recevoir l’enseignement de l’école de Roke, étant réduites à des sorcelleries primitives « de village » (notez que dans un même monde, des restrictions inverses en matière de genre peuvent coexister : seules les femmes peuvent servir les dieux, même les plus masculins – guerre, forge, force, etc. -, tandis que seuls les hommes ont la possibilité « génétique » / le droit social de manier le Fluide, par exemple, ou l’inverse). On peut aussi se demander qui est (génétiquement) le plus puissant des deux dans le maniement des énergies arcaniques : l’homme ou la femme (c’est cette dernière dans le mythe Arthurien, clairement) ? L’humain ou l’elfe ?

Dans certains cas, les réponses peuvent paraître évidentes : bien sûr que seuls les prêtres d’une divinité peuvent employer sa magie divine spécifique… pas vrai ? Oui mais non, en fait. Le prêtre peut-il postuler et, pourvu qu’il passe les épreuves qui lui sont imposées, ensuite recevoir le pouvoir de sa déesse ou de son dieu, ou celui-ci a-t-il des élus, son choix étant irrévocable et personnel, et pas affaire de choix de carrière du futur prêtre et de compétence ? On peut aussi décider qu’il existe différents niveaux d’initiation, et que certaines personnes qui ne sont pas prêtres puissent employer au moins certains pouvoirs d’une déité : on imagine très bien un dieu des forgerons souffler deux-trois secrets à ces derniers sur la manière d’avoir un feu suffisamment chaud pour forger des armes exceptionnelles, ou les initiés d’un culte à Mystères recevoir quelques menus pouvoirs même s’ils ne sont pas au sommet de la pyramide. Enfin, une question intéressante se pose : qu’en est-il des combinaisons de sources ? Si un individu n’est qu’initié et pas prêtre d’un culte, qu’est-ce qui l’empêche de devenir aussi devin, nécromancien, ou quoi que ce soit d’autre maniant une autre source de magie ? Une prêtresse d’Hécate ou d’Isis (ou équivalent venant du monde réel ou de votre propre imagination), divinités de la magie, ne devrait-elle pas obtenir l’accès aux pouvoirs des tisseurs de sorts arcaniques en plus de sa magie divine, justement parce que sa déesse tutélaire est la maîtresse de cet art ?

Il vous faut aussi penser à la façon dont les pratiquants de telle source (voire forme, telle que définie plus haut) de magie sont structurés entre eux : si, pour la magie divine, la chose est facile (il y a des temples, une hiérarchie avec des prêtres, des grands prêtres, l’équivalent d’un Pape, etc.), la réponse peut être moins évidente et nécessiter plus de réflexion pour d’autres sortes de magie. Par exemple, les magiciens arcanes sont-ils des solitaires vivant dans une tour isolée au fin fond des bois ou du marais ou sont-ils rassemblés en guildes ? Pour recevoir un enseignement en magie, faut-il se mettre au service d’un magistère en tant qu’apprenti, ou peut-on être l‘élève d’une école de sorcellerie ? (notez que les deux peuvent coexister : dans Terremer, Ged est l' »apprenti » d’Ogion avant d’être élève à Roke). Si recevoir l’enseignement d’un maître en magie blanche est aisé à trouver, être initié aux sombres arcanes des plus viles et sombres sorcelleries est-il plus compliqué, tout simplement du fait que les autorités tuent les sorciers à vue et que donc, leurs repaires sont cachés et qu’ils ont tendance à accueillir avec suspicion un étranger ? (je me dis qu’il y aurait probablement quelque chose à faire avec un équivalent maléfique de Roke ou de Poudlard, tiens…). Et d’ailleurs, quelle est la relation entre la guilde des nécromanciens et celle des alchimistes ? Rivales, voire ennemies ? Et avec le pouvoir « profane » (« Moldu », comme dirait Mr Potter) en place ? Seuls les magiciens patentés par les autorités ont-ils le droit d’exercer leur art, les autres étant pourchassés par un dérivé de l’Inquisition / une police arcanique (cela pose d’ailleurs l’importante question du statut social des mages dans votre univers : élite -c’est souvent le cas -,  parias, l’un ou l’autre selon la forme de magie pratiquée et la façon dont elle est considérée par les autorités) ? Quelles sont les relations entre les magiciens arcaniques et les prêtres ? Comment une guilde de magie blanche voit-elle le temple du dieu du Mal à deux rues de chez elle ? Quand les deux « bandes » se croisent sur la place centrale de la cité, des échauffourées sont-elles à craindre, avec des énergies destructrices volant en tous sens ?

On le voit, les questions auxquelles répondre sont nombreuses. Vous pourriez faire comme certain(e)s et ne donner réponse à RIEN ou quasiment, vous contentant de montrer 2-3 sortes de magies différentes sans expliquer d’où ça vient, pourquoi machin peut lancer un sort et pas machine, mais n’espérez pas gagner des millions (de dollars ou de lecteurs) comme ça, à moins de vous appeler Glen Cook (ou 2-3 autres auteurs).

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La magie et ses conséquences

Soul Sacrifice, Santana, 1969.

Dans certains univers ou paradigmes magiques, lancer un sort (ou le simple fait de pouvoir lancer un sort) n’a aucune conséquence, tandis que dans d’autres, elles peuvent être lourdes. Premier point, dans le cas de la magie divine ou de celle des pactes, le jeteur de sorts doit respecter, selon le cas, les commandements de sa divinité ou le pacte qui le lie à l’entité qui lui confère ses pouvoirs, faute de quoi ceux-ci peuvent lui être retirés (ou pire, l’entité en question peut se retourner contre lui, son clergé l’excommunier, voire sa déité le foudroyer sur place…). Un prêtre d’un dieu de la guerre qui refuse d’aller au combat en première ligne ne restera probablement pas investi de sa puissance longtemps, à moins d’entreprendre une lourde expiation, qui peut très bien être le catalyseur de l’intrigue, que ce soit celle d’un roman ou d’un scénario de jeu de rôle par exemple si elle implique un tour complet des sanctuaires les plus sacrés de la déité en question, qui peuvent s’étendre sur un, voire plusieurs continents.

Deuxièmement, le fait de lancer un sort peut impliquer un sacrifice, qu’il soit personnel (donner son âme au diable) ou pire, concerne une autre personne ou créature. Certains dieux (Théurgie) ou entités (magie des pactes) peuvent ainsi exiger le sacrifice régulier (lors des solstices ou des équinoxes, lorsque certaines configurations astrales bien particulières se produisent, tous les mois, une fois par an, voire une fois par jour) d’un animal, d’un humanoïde (humain, elfe, orc, etc.), de richesses ou d’autre chose pour continuer à prêter une partie de leur puissance au magicien.

Troisièmement, le simple fait de jeter un sortilège peut fortement fatiguer un magicien, qui est alors sans défense pendant un temps (souvenez-vous de Gandalf qui se retrouve épuisé après avoir utilisé une simple incantation de verrouillage de porte, ou de Ged qui est forcé de déployer presque toute son énergie pour résister à la pression mentale exercée par les Innommables dans les tombeaux d’Atuan), voire même être lancé non pas en utilisant un Fluide magique externe, mais la propre énergie vitale du sorcier. Ce qui peut par exemple signifier que chaque fois que vous lancez un sort, vous perdez une durée de vie proportionnelle à sa puissance : une banale incantation vous en fait perdre un jour, voire une semaine, un sort standard un ou plusieurs mois, un vraiment puissant un an, plusieurs voire, dans le cas des plus terribles enchantements, des décennies. Un paradigme de ce type aurait de fascinantes conséquences sur l’usage de la magie : d’abord, il se ferait beaucoup moins « à la légère », puisque le coût étant important, on ne lancerait de sorts qu’en cas de nécessité impérieuse ; ensuite, on imagine que cela encouragerait une mutualisation des coûts en énergie, l’effet magique désiré n’étant pas le résultat d’un sort lancé par une seule personne mais d’un rituel incanté par un cercle de magiciens (si une formule entraîne la perte de l’équivalent d’un an d’énergie vitale, et qu’elle est psalmodiée par douze ritualistes, chacun ne perdra « que » un mois d’espérance de vie, ce qui est tout de même plus raisonnable) ; et ensuite, on imagine sans peine que les plus vils sorciers et nécromanciens mettraient au point des sortilèges, des armes ou des bâtons / baguettes magiques volant l’énergie vitale des autres afin d’alimenter leur puissance arcanique sans puiser dans leur propre espérance de vie (on peut aussi imaginer une contrepartie plus « vertueuse », où la guilde des magiciens accepte de protéger la cité / le royaume en échange d’un don d’énergie vitale de la part de la population, disons 1 an ou 2-3, l’équivalent d’un service militaire).

Ce qui me conduit d’ailleurs à parler de l’éthique du lancement de sorts, sujet brillamment exploré par Ursula Le Guin dans Terremer : comme elle le dit, « Allumer une chandelle, c’est projeter une ombre » ; ou : un acte magique, si banal paraisse-t-il, modifie l’équilibre du monde, et doit être soupesé avant d’être accompli. Et la chose est encore plus vraie si même le plus bénin laisse une trace concrète : il existe des univers où la magie laisse un résidu toxique / mutagène, détruit la Nature (nombre de formes de magie circonvenant les lois naturelles, elles sont donc antithétique à l’ordre des choses) ou bien relâche une quelconque forme de vie ou un autre phénomène néfaste (paradoxes cherchant violemment à rétablir l’ordre naturel, créatures démoniaques ou extradimensionnelles profitant de l’affaiblissement du tissu de la Réalité pour franchir les barrières qui, normalement, séparent votre monde de leur Plan, etc.). Si vous êtes intéressé par le sujet, j’en ai brièvement parlé dans cet autre article.

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La magie, une ressource épuisable ?

Comme nous l’avons vu, si la magie peut subir des cycles temporels ou si le niveau de Fluide / Mana peut être plus ou moins dense selon la région du monde où on se trouve, ces variations peuvent être prévues ou cartographiées. De plus, dans la majorité des systèmes de magie, le fait de lancer un sort ne va pas épuiser la magie, pas de façon irrévocable, en tout cas : soit les réserves de magie du jeteur de sort vont baisser, soit celles de l’environnement local vont diminuer, mais dans les deux cas, le niveau va revenir à la normale au bout d’un certain temps. Il existe cependant de nombreux cas possibles où la source va se tarir plus ou moins brusquement, et ne pourra pas forcément être régénérée, ou en tout cas pas avant un temps extrêmement long : si on établit une analogie entre le fluide magique et le pétrole, par exemple, il faut des millions d’années à ce dernier pour être créé par des processus naturels, et donc un gisement pétrolier entièrement vidé ne pourra être reconstitué dans l’avenir prévisible. De même, un dieu (voire tout un panthéon) peut mourir, la connexion avec les puissances d’autres plans d’existence avec lesquels vous établissez vos pactes peut être coupée du fait de la fin d’alignements cosmiques particuliers, et ainsi de suite. La pénurie la plus évidente étant le cas où la magie repose entièrement sur une substance (un métal tombé des étoiles, le sang des dieux répandu lors de la Bataille Finale, des gemmes mystiques, etc.) ET que l’effet magique qu’elle déclenche la détruit ou lui fait perdre son pouvoir (au passage, faire reposer la magie sur une substance en quantité limitée est un bon moyen d’expliquer pourquoi tout le monde ne pratique pas la magie : pas parce qu’il faut un don, pas parce que l’enseignement est fermé à certains, mais tout simplement parce qu’il n’y a pas assez de la substance pour tout le monde ; si on fait un parallèle avec l’Épice de Dune, on imagine aussi les énormes conséquences géopolitiques et scénaristiques d’une répartition très inégale des gisements de ladite substance).

Le scénario peut aussi se bâtir sur une disparition imprévisible de la magie, non pas en raison d’un cycle essor / déclin naturel et prévisible, mais d’un évènement, naturel ou sciemment provoqué, qui, lui, ne l’est pas. Là encore, Ursula Le Guin offre un très bon exemple de la chose dans le troisième tome du cycle de Terremer, L’Ultime rivage.

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Le magicbuilding, un catalyseur de l’intrigue, l’intrigue, la première pierre du magicbuilding

Bâtir un magicbuilding peut avoir une autre utilité que ne pas voir son bouquin géééééénial se faire démolir dans une critique du Culte d’Apophis ou d’espérer égaler Brandon Sanderson. Les plus éveillés d’entre vous ont probablement compris que certaines réponses aux questions posées précédemment dans l’article peuvent à elle seules donner la base de l’intrigue d’un roman, la caractéristique saillante d’un monde de jeu de rôle, d’un manga, d’un film, d’une série, etc. Mais l’inverse est également possible : on peut savoir où on veut aller et bâtir le magicbuilding non pas par le bas, mais par le haut, pour permettre à l’intrigue de se mettre en place.

Admettons, par exemple, que vous décidiez que les femmes ont la possibilité « génétique » d’apprendre la magie tout comme un homme, mais que socialement, ce soit inacceptable, et que donc, l’accès aux écoles de magie leur soit interdit, et que toute femme prise à étudier clandestinement risque la mort, la prison, la rééducation, etc. Ou qu’au sein du clergé de Truc, il existe plusieurs schismes qui ne peuvent tellement pas se voir que, même culte ou pas, ça finisse en guerres de religion, surtout si chacun des schismes a son QG dans un royaume différent, qui ne peuvent déjà pas se voir à la base, ce qui ne fait qu’empirer les choses ? Ou que le pouvoir temporel observe avec un oeil de plus en plus inquiet l’influence des guildes / écoles / confréries de magie arcane, et qu’il s’allie avec le clergé pour les empêcher de transformer la contrée en Magiocratie ? Ou encore que les agents de l’Inquisition Arcanique traquent les magiciennes clandestines non pas pour les obliger à exercer leur art dans le cadre légal, mais pour s’en servir comme reproductrices pour donner naissance à des légions de mages endoctrinés dès leur naissance pour une obéissance aveugle à l’Empereur, qui disposerait ainsi d’un instrument surpuissant pour asseoir ou faire perdurer son règne tyrannique, par exemple pour contrebalancer le pouvoir des Maisons nobles ou d’autres factions comme les militaires ? (Dune rencontre Star Wars, n’est-ce pas). Eh bien rien qu’en imaginant cela, vous avez votre intrigue : Machine va se « battre » pour être la première à être admise à l’école de magie de Trucbidule ; la guerre de religion va éclater et les personnages vont avoir un rôle central dans sa résolution (par exemple en découvrant que les schismes en guerre ont été infiltrés par une religion rivale, qui a ensorcelé les plus hauts prêtres pour attiser les tensions et faire se détruire cette religion de l’intérieur) ; Capturée, Bidule va découvrir les sombres camps de reproduction de l’Empire, parvenir à s’échapper, faire éclater l’affaire au grand jour, déclenchant une révolte qui va finir par renverser le tyran.

On le voit, le magicbuilding peut générer l’intrigue. Mais l’inverse est aussi vrai : vous pouvez partir de ce que vous voulez raconter, et générer le magicbuilding en conséquence (et à vrai dire, pour certains exemples cités juste au-dessus de ce paragraphe, c’est beaucoup plus probable dans ce sens là que dans l’autre). Si ce que vous voulez raconter est la libération des femmes de votre univers d’une oppression, d’une discrimination ou d’une injustice, vous allez spécifiquement construire votre magicbuilding pour qu’une telle chose existe, par exemple en restreignant l’accès à l’enseignement en magie au seul genre masculin.

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Les outils de la magie

Jeter un sort peut nécessiter plus qu’un Don, un enseignement, la connaissance de la « recette » du sortilège concerné et / ou une quantité minimale d’énergie magique ambiante : parfois, d’autres conditions sont nécessaires pour que, littéralement, le charme opère. Ce qui est intéressant est que, là aussi, ces conditions peuvent souvent (mais pas forcément) être dérivées du paradigme magique que vous avez mis en place : si, comme chez Ursula Le Guin ou Tolkien, le monde a été créé par (respectivement) la Parole ou le Chant, il est très probable qu’utiliser la magie implique de prononcer ou de psalmodier ou fredonner une incantation à haute voix ; si, comme chez Tasha Suri elle est inspirée par la danse de Shiva, elle nécessitera certaines postures ou mouvements de danse. Le corollaire est que si ces actes ne peuvent pas être accomplis (le magicien est bâillonné, sous l’effet d’un sort de silence jeté par son vil ennemi, attaché ou sous le coup d’une Formule de paralysie dans laquelle l’a empêtré son maléfique adversaire, etc.), son pouvoir ne peut pas se manifester. Ce qui donne alors aux praticiens d’autres formes de magie (celle d’origine psychique, par exemple) qui n’ont pas ces limitations un avantage.

De même, un sort (ou certains sorts, typiquement les plus puissants) peut exiger non pas un incantateur mais tout un cercle de ritualistes, ou bien l’adjonction de talismans particuliers et autres objets rares (ce que Donjons & Dragons appelle des « composantes matérielles », et qui est également utilisé dans la légendaire tétralogie de Livres dont vous êtes le héros Sorcellerie), ou encore être si complexes que le magicien doit obligatoirement avoir un grimoire ouvert devant lui. Pour justifier l’emploi des bâtons de mage ou des baguettes magiques communes à de nombreux univers, on peut aussi imaginer que plus un sort est puissant, et plus il nécessite d’énergie magique, mais qu’au-delà d’une certaine quantité, le corps humain (ou elfique, hobbit, etc.) soit incapable de l’encaisser, et qu’il ait donc besoin d’un « régulateur » pour canaliser le flux. Ce qui explique donc que si le mage est séparé de cet accessoire arcane, il se retrouve soit sans pouvoir, soit réduit aux expression les plus basiques de celui-ci. On peut d’ailleurs étendre le concept et surtout l’adapter à chaque forme de magie : un devin n’utilisera pas un bâton ou une baguette mais plutôt une boule de cristal (Tolkien dirait : un palantir ou le « miroir » – en fait un bassin – de Galadriel), un nécromancien emploiera le crâne d’un ancien collègue de son Ordre, un Sorcier utilisera un anneau (mon Précieux….), un prêtre le symbole de sa divinité (le marteau de Thor, la chouette d’Athéna, le chien noir d’Hécate, etc.) ou des parchemins sacrés, et ainsi de suite.

Outre le fait de placer des limites aux pouvoirs des mages de votre univers, là aussi cet aspect du magicbuilding peut impacter d’autres aspects du worldbuilding, voire l’intrigue : si la magie nécessite des substances rares (des plumes de griffon, du sang de dragon, des yeux de Méduse, etc.) pour fonctionner, une industrie peut se bâtir pour les récolter (et hop, vous justifiez l’existence d’une partie des aventuriers !) ou les vendre ; si le bâton « de mage » est le symbole du pouvoir de ces derniers, certains peuvent en arborer de simples copies pour se faire passer pour ce qu’ils ne sont pas (utile pour un marchand ambulant qui chemine seul ou en petit groupe : un groupe de bandits de grand chemin hésitera toujours plus à s’attaquer à un jeteur de sorts qu’à un banal camelot).

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Employer un vocabulaire adapté pour parler de magie

Je ne vais pas revenir une centième fois sur le « bien » que je pense de la masturbation intellectuelle à laquelle se livrent un nombre effrayant d’auteurs de fantasy français sur le plan stylistique, voire certains traducteurs comme Jean Sola. Cela va pourtant vous surprendre, mais je pense que si il y a un domaine où, par contre, sortir le Dictionnaire des synonymes pour briller en société est hautement pertinent (en tout cas plus que de balancer de la sénestre, de l’enfançon ou du marmoréen toutes les deux pages), c’est bien la magie. Tout simplement parce que outre donner à votre prose une atmosphère plus mystique (et élégante – mais vraiment élégante, hein, pas m’as-tu-lu, il y a une grosse différence entre les deux !), cela peut permettre de distinguer facilement les caractéristiques de votre jeteur de sort. Si je vous dis que Tartempion est magicien et Machine prêtresse, je n’ai pas besoin de vous expliquer que le premier est un homme pratiquant la magie « traditionnelle » et que le second personnage est une femme tirant son pouvoir de son allégeance à une déité quelconque. Mais on peut aller plus loin, distinguant deux personnages de même genre et exploitant le même paradigme (la même source) magique : Tartempion peut être un Invocateur et Bidule un Devin ; on comprend aisément, rien qu’au terme employé, que la sorcellerie du premier convoque des créatures venues d’ailleurs (anges, démons, djinns, etc.) sur Terre / votre planète imaginaire, tandis que l’art du second est de lire l’avenir (ou les avenirs possibles). La « moralité » peut aussi être exprimée dans le titre du mage : magicien peut par exemple désigner la magie commune (neutre) ou blanche / bénéfique, sorcier la noire / maléfique. Le terme peut aussi donner une idée du niveau de puissance du jeteur de sorts : Maître Mage ou Magistère peut aussi bien qualifier un praticien expérimenté des arts occultes qu’un autre qui a déjà formé avec succès des apprentis ; Archimage peut désigner le chef des mages d’une guilde, d’une école de magie, d’un royaume, voire du monde entier ; et ainsi de suite. Et comme nous l’avons vu plus haut, un simple mot peut donner une idée de la source du pouvoir magique, surtout si vous avez fait du grec ancien ou du latin pendant vos études, et que vous pouvez décoder aisément des termes comme nécromancie ou oniromancie.

La même logique prévaut pour le simple nom de la science de la génération d’effets surnaturels : on peut appeler ça magie, mais ça a tout de même plus de panache de qualifier cela d’arts mystiques, de sciences occultes, de Grand Art, de thaumaturgie (littéralement « faire des miracles »), et j’en passe. De même, on peut « jeter un sort », ou incanter une Grande Formule, tisser un sortilège, psalmodier un charme, proférer une malédiction ou un maléfice, conduire un exorcisme ou un rituel, prendre l’adversaire dans les rets d’un envoûtement, conjurer un démon, etc.

Il faut, par contre, se méfier lorsqu’on nomme un groupement de mages : une école de magie n’équivaut pas à une université (qu’on imagine plus dans un contexte Renaissance-Fantastique que Médiéval-Fantastique, ou alors plutôt tardif en terme d’inspiration historique), puisqu’on peut imaginer que dans cette dernière, se fera soit un enseignement plus avancé, soit au moins autant de recherche que d’enseignement. Une confrérie / Sororité n’est pas équivalente à un simple Club de mages (on imagine que dans la première, il peut y avoir une Initiation, des serments, des Mystères, des rangs, qui n’existent pas dans le second, à part le fait d’y être admis ou pas), et même le terme de « Club » peut aussi bien désigner un groupement inspiré par ceux pour Gentlemen britanniques que tout au contraire, quelque chose inspiré des clubs de motards (imaginez un équivalent arcanique des Hell’s Angels ou, sur le versant fictif, des Sons of Anarchy !), c’est-à-dire de jeteurs de sorts en délicatesse avec la loi locale (ou ayant du mal avec les règles contraignantes de leur société) qui se réunissent (comme des malandrins formeraient une guilde des voleurs) avec d’autres mages partageant leur état d’esprit. Si la magie est réglementée dans le royaume local, on peut aussi imaginer que tous les jeteurs de sorts qui veulent l’exercer légalement doivent être inscrits à l’Ordre des Mages, tout comme un pharmacien moderne est obligé d’être inscrit à son Ordre de tutelle pour pouvoir exercer.

Enfin, n’oubliez pas que certaines civilisations de notre monde réel vous offrent des alternatives pour nommer vos jeteurs de sorts, tout spécialement si, justement, une des cultures de votre monde secondaire / imaginaire est inspirée par cette même civilisation : le terme Miko, issu du japonais, peut aussi bien désigner une prêtresse, une prophétesse ou une shamane, Völva en est un équivalent dans la sphère germano-scandinave, Vestale peut éventuellement être employé pour toute prêtresse d’une des déesses-vierges gréco-romaines (Athéna / Minerve, Artémis / Diane, etc.) ayant fait vœu de chasteté (même si, historiquement parlant, le terme était évidemment réservé aux moniales de Vesta), et ainsi de suite.

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Les magiciens ne sont pas un groupe monolithique

On se gardera de considérer tout groupement de jeteurs de sorts, quelle que soit la nature dudit groupement ou la source du pouvoir des magiciens, comme quelque chose de monolithique : une façon efficace de donner de la substance à un monde imaginaire est de le peupler d’une multitude de factions et lobbys, en concurrence (voire en conflit) entre eux. Par exemple, l’histoire réelle nous montre avec quelle facilité les religions majeures peuvent se diviser en schismes ou en branches parallèles, qui peuvent tout aussi bien coexister plus ou moins pacifiquement que mener à de sanglantes guerres. Il n’y a aucune raison pour que les adeptes d’un même dieu fassent tous partie du même groupe, et ces subdivisions peuvent être de plusieurs natures différentes : toujours en s’inspirant de l’histoire réelle, on peut distinguer les prêtres à proprement parler de moines-soldats du type Templiers. Mais en plus des ordres militaires, il peut aussi y en avoir d’autres, soit hybrides (de type Hospitaliers, par exemple, à la fois militaires et médicinaux), soit dédiés à une seule activité (des lettrés dédiés à la conservation du savoir, la théologie, etc.). Si la déité révérée a sous son patronage des activités très diverses (Athéna est à la fois une déesse de la guerre, de la sagesse, de l’artisanat et de plusieurs autres domaines encore), la division devient évidente : pour reprendre l’exemple de la déesse aux yeux pers, on imagine qu’il y aura une Sororité de Vierges-Guerrières en tant qu’Ordre combattant, un Ordre de sages, un autre embrassant l’aspect civique, communautaire et artisanal de cette divinité, etc. Là où les choses prennent un tour intéressant, c’est soit quand un Ordre pense détenir la vérité absolue et tente de supprimer les autres pour que tout le clergé n’embrasse qu’un seul aspect de la déité qu’il sert, soit quand un dieu a plusieurs visages ou avatars ou qu’il a un comportement chaotique / imprévisible, ce qui fait que deux prêtres servant, sur le papier, la même déité pourront avoir une apparence, des pouvoirs ou des doctrines radicalement différents.

Dans le même ordre d’idées, des magiciens arcaniques pourront être divisés en différentes organisations (R. Scott Bakker – ou plutôt son traducteur – appelle cela des Scolasticats) en fonction de différents critères, qui peuvent tout simplement être la forme de magie pratiquée (et / ou par le sexe du jeteur de sort : on peut imaginer des scolasticats mixtes, ou bien exclusivement féminins ou masculins), le royaume d’origine, une philosophie commune, une allégeance à tel ou tel potentat, nation, doctrine ou quoi que ce soit d’autre, une « moralité » identique (vu à quel point la magie noire est « impopulaire » – version fourches et torches- dans la plupart des mondes imaginaires, l’union fait la force), ou bien tout cela (et parfois plus encore) à la fois. Ces « scolasticats » pourront avoir leur blason, leurs tabards et bannières, leurs « hymnes » ou chants de guerre, comme un Ordre combattant religieux type Templiers : si l’on imagine une contrée inspirée par la Bretagne médiévale, un scolasticat de nécromanciens-élémentalistes de glace (et pourquoi ça ne pourrait pas exister, hein ?) pourra se nommer les « Ankou Caille », et marcher vers la mêlée en scandant « ANKOU CAILLE, ANKOU CAILLE, C’EST LA BATAILLE, C’EST LA BATAILLE ! » (pour les plus jeunes qui n’ont pas la référence : clic). Plus sérieusement, si l’Inquisition Arcanique royale ou religieuse menace les mages, un scolasticat peut constituer un efficace contre-pouvoir, surtout si les mages qui le forment sont nombreux et puissants, et encore plus s’il est présent dans plusieurs royaumes, diminuant le risque d’une frappe « unique » le détruisant d’un coup.

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Les contre-pouvoirs aux magiciens

* Dirty Magic, The Offspring, 2012.

Le très gros problème avec un sorcier qui peut transformer votre sang en acide, avec une prêtresse qui peut vous changer en statue de sel ou avec un élémentaliste qui peut déchaîner la foudre sur vous est qu’on voit mal ce qui peut l’empêcher de faire ce qu’il veut. Tuer celui qui le regarde d’une façon qui ne lui plaît pas, « réquisitionner » (piller) ce qui lui fait envie, prendre contre son gré une femme ou un homme qui a éveillé son désir. Et les choses sont encore pires quand le jeteur de sorts en question a dépassé un certain niveau de puissance (pour ne pas dire un niveau de puissance certain), quand même une armée entière ne sera sans doute pas suffisante pour le stopper, et quand il fera de jeteurs de sorts moindres ses jouets. Dans un univers comme celui des Poudremages de Brian McClellan, on imagine que le tir simultané de toute une batterie de canons pourra probablement lui causer quelques problèmes, ou qu’une bête mythique comme un Dragon, une Chimère, une Hydre de Lerne, etc., pourra se révéler un adversaire à sa hauteur, mais la poudre à canon est loin d’être une constante dans les univers de Fantasy, et une tendance nette, ces dernières années, est justement à des contextes de Low Fantasy, pauvres en ce genre de monstres surpuissants.

On pourrait bien sûr imaginer que comme les Jedi (vous savez, les mages de cette œuvre de Fantasy très connue qu’est Star Wars  😀 ), les tisseurs de sorts de votre univers s’astreignent à un code éthique, moral et de conduite monacal (ou presque), mais d’une part cela ne va guère dans le sens des fantasy moins manichéennes qui se sont développées ces dernières décennies, et d’autre part qui dit Jedi dit Siths, ce qui ne règle donc absolument pas le problème, bien au contraire. En revanche, les bases mêmes de votre Magicbuilding peuvent vous fournir des solutions bien plus efficaces : les zones riches en Fluide / Mana peuvent être rares, ce qui limite donc automatiquement la puissance des magiciens ; si la magie est basée sur une substance rare et / ou épuisable, on ne lancera ses sorts qu’avec parcimonie et pas pour griller ceux dont la tête ne vous revient pas ; si le pouvoir vient d’une puissance extérieure, dieu ou esprit, celui-ci peut mettre un frein aux destructions de celui ou celle à qui il prête son pouvoir si cela est contraire à sa propre moralité ou ses intérêts.

Une autre manière de tenir les mages en laisse est de les faire se réguler les uns les autres : le roi local peut monter une Police Arcanique formée uniquement de jeteurs de sort d’élite, capables (surtout s’ils travaillent en équipe) de neutraliser n’importe quel renégat, à l’exception éventuelle d’un archimage ou équivalent (ce qui limite tout de même fortement les dégâts). L’Inquisition émanant du clergé du plus puissant dieu de l’empire peut garder un oeil vigilant sur les tisseurs de sorts profanes. Les shamans elfes des plaines ou les druides centaures peuvent montrer aux colons venus de par-delà l’océan ce qu’est la vraie puissance de la Nature ou des esprits. Deux covens de sorcières peuvent se regarder en chiens de faïence, neutralisant les membres du groupe adverse perdant le sens de la mesure afin, en comparaison, de faire d’autant plus briller leur propre blason. Les possibilités sont infinies.

La chose est plus délicate dans le cas de non-magiciens devant, sans aide mystique, neutraliser un puissant mage : on peut imaginer que celui-ci succombe sous le nombre, même si, passé une certaine puissance, le nombre en question doit être faramineux (l’équivalent d’une légion romaine contre une Dame du Lac, qui gagne ?) ; on peut aussi imaginer que certains naissent non pas avec le gène de la sorcellerie, mais celui de l’antimagie, étouffant tout pouvoir à plusieurs mètres (voire dizaines ou centaines) autour d’eux, ou qu’ils disposent d’anciens artefacts pouvant vider un mage de son Fluide (temporairement) par simple contact, voire… le tuer (les chorae de R. Scott Bakker) ; ou tout simplement, ses réserves de pouvoir épuisées, cette sorcière si redoutable quelques minutes avant peut redevenir une simple femme dépourvue d’armure et incapable de manier une arme avec une quelconque compétence, et être à la merci du dernier des hommes d’armes venu. D’où, d’ailleurs, dans certains univers (La Roue du Temps et ses champions, les Vakeros de Loup Solitaire, etc.), le fait qu’il existe une caste de gardes du corps (parfois de guerriers-mages) devant couvrir leur jeteur de sorts attitré si sa magie devient faible ou s’il est trop occupé à incanter un puissant sortilège pour se préoccuper du chevalier adverse bien décidé à lui trancher le col.

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La place des magiciens dans la société

Dans beaucoup d’univers, les mages sont respectés et ont un rang social élevé, grossièrement équivalent à celui d’un chevalier pour un magicien banal, égal à celui d’un roi ou d’un grand-prêtre, voire d’un empereur ou du pontife suprême d’une religion, dans le cas d’un archimage. La chose étant à moduler en fonction de la rareté, en plus de la puissance, des jeteurs de sorts : si votre univers à un profil type Terre du Milieu / équivalent mystique d’un monde de super-héros, les individus dotés de pouvoirs seront très peu nombreux, et donc d’autant plus respectés (ou craints). À l’inverse, si presque n’importe qui peut lancer un sort ou deux, le statut social d’un mage, même puissant, aura tendance à s’abaisser : l’archimage a un statut de chevalier, le sorcier commun celui de simple notable.

Dans d’autres contextes de Fantasy, en revanche, les mages, ou certains d’entre eux du moins, ont un statut de parias, pourchassés par les autorités, le clergé, les rémouleurs et les lavandières. Cela peut concerner les magiciens profanes par opposition aux prêtres, les religieux appartenant à un schisme par ceux restant fidèles à la doctrine d’origine ou principale, les sorcières de campagne par une populace terrifiée (à tort ou à raison), des tisseuses de sort entrées dans la clandestinité pourchassées par la Police Secrète Arcanique Royale, des démonistes ou des nécromanciens par des mages blancs (bénéfiques), et j’en passe. Ce qui me conduit d’ailleurs à vous faire remarquer que là encore, rien n’a vocation à être monolithique, et que plus votre magicbuilding aura de multiples facettes, plus il sera riche et intéressant. Les praticiens de certaines sources / certains paradigmes magiques seront riches et respectés, d’autres traqués, tandis que la plupart auront une vie plus « ordinaire ».

Ce qui nous conduit à nous demander de quoi un mage vit exactement, et les possibilités sont nombreuses : il peut être financé par une école / université de magie et passer son temps en enseignement ou en recherche (ou bien accepter de prendre un ou plusieurs apprentis en échange d’une somme d’argent conséquente, versée annuellement) ; son clergé peut lui verser une rente en tant que prêtre ; il peut s’établir en tant qu’artisan et enchanter des objets (une remarque anodine dans le second tome de Loup*Ardent avait fait forte impression sur moi : le fait que la guilde des alchimistes traite des sortes de bâches ou de toiles funéraires recouvrant entièrement un palais pour que les éléments ne l’altèrent pas ; on peut imaginer que ce genre de sort soit en forte demande chez les professions travaillant en extérieur) ; il peut explorer d’antiques ruines à la recherche de secrets arcaniques perdus, récoltant de précieuses pièces anciennes et autres joyaux au passage ; il peut exercer un « chantage à la protection » dans la plus pure tradition des syndicats du crime et autres guildes de voleurs (« paye-moi telle somme chaque mois ou je lance une boule de feu sur ta boutique »), voire tout bonnement assaillir et piller caravanes, galions ou villages, et ainsi de suite.

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La couleur (émotionnelle) de la magie

Un point important est l’atmosphère qui se dégage de la partie magique d’un worldbuilding : tout ce qui concerne la magie sera-t-il miraculeux, ou au contraire si intégré dans la vie courante (par exemple en cas d’industrialisation de la fabrication d’objets magiques : imaginez un monde de Fantasy arabisant où tout le monde possède non pas une Ford T, mais un tapis volant, parce que quelqu’un a réussi à les fabriquer à la chaîne !) qu’elle en devient banale ? L’ambiance est-elle au merveilleux, aux sombres arcanes de la plus ténébreuse des sorcelleries, ou à un mysticisme empreint de mystère ? Bien appliqués, et avec un écrivain suffisamment solide, certains de ces choix peuvent donner des romans à l’atmosphère envoutante, comme Terremer d’Ursula Le Guin ou Les Chroniques des crépusculaires de Mathieu Gaborit, notables non seulement pour leur excellent magicbuilding, mais aussi pour l’atmosphère unique qui s’en dégage (je vous proposerai d’ailleurs prochainement des listes de lecture conseillées sur ces deux sujets).

Dans certains cas, les choix effectués dans les sections précédentes de cet article influenceront fortement l’atmosphère : si le sujet est la lutte de courageuses enchanteresses clandestines contre l’Inquisition Arcanique royale ou celle du culte dominant, ou bien de femmes possédant dans leur sang le Don de magie qui fuient une Confrérie de sorciers qui veulent utiliser leur ventre pour engendrer une race de mages noirs invincibles, on se doute que l’atmosphère sera plus ou moins sombre (m’enfin bon, regardez Star Wars, cette grande œuvre de Fantasy, ça peut aussi être très héroïque tout en étant, au moins parfois, sombre – ahem Rogue One, hum -). Dans d’autres cas en revanche, les choix effectués ouvrent toutes sortes de possibilités : souvenez-vous que vous n’êtes pas obligé de faire dans le monolithique, et que certains pans de votre magie peuvent être merveilleux / sombres / mystiques tandis que d’autres peuvent être complètement différents.

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Le mieux peut être l’ennemi du bien

Si bâtir un magicbuilding riche, complexe et détaillé est à priori une meilleure chose que ne rien faire, ou mal faire, ou trop peu faire, il faut toutefois se garder de trop en faire, même si en la matière, il n’y a aucune règle ; mettre au point le magicbuilding d’un univers de roman, pour le coup, sera différent de le faire pour un jeu de rôle (par exemple), car dans ce dernier cas, plus il y a de détails, et mieux c’est, particulièrement pour le maître de jeu, mais aussi pour que les joueurs puissent avoir une idée précise de l’univers dans lequel ils évoluent (même si un MdJ intelligent saura adapter ce qui peut l’être, c’est-à-dire ce qui ne dénaturera pas complètement cet univers). Peu de lecteurs de romans ont aujourd’hui l’envie ou la patience de parcourir des dizaines de pages d’appendices ou de lexique, même si certaines franges du lectorat, voire le lectorat tout entier dans de rares cas, seront au contraire demandeurs d’un luxe sans cesse grandissant de détails (Tolkien me paraît être l’exemple emblématique de la chose). Gardons-nous donc des généralisations et des raisonnements binaires, tout en gardant à l’esprit que dans la mesure du possible, un élément de magicbuilding devrait être conçu pour servir à quelque chose, notamment à catalyser l’intrigue, la géopolitique locale, à donner une particularité unique à un personnage (il peut, par exemple, manier une forme de magie inconnue / rare / exotique / présumée perdue / qui est la fusion inédite et jusqu’ici considérée comme impossible de deux autres / etc.), et ainsi de suite, pas « juste » à faire joli (même si ça donne de la substance à votre univers, et que ça ne sert pas tout à fait « à rien » non plus). C’est tout spécialement vrai si vous partez du haut (vous savez où vous voulez aller avec l’intrigue, elle met en jeu le magicbuilding, et vous construisez celui-ci en fonction de l’intrigue) : ne mettez en place que ce dont vous avez besoin au stade T de l’intrigue, il sera toujours temps de compléter le magicbuilding dans un tome ultérieur (roman) ou le sourcebook suivant (jeu de rôle). Et la remarque vaut pour l’aspect spatial, pas seulement temporel : peu importe comment la magie est pratiquée à deux continents de là si vos personnages n’y vont pas (encore) SAUF dans le cas cité plus haut d’un personnage « exotique » qui, justement, peut venir de là-bas.

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Trop long, j’ai pas lu, lol

Bon, alors si vous n’avez pas l’envie de vous lancer point par point dans la construction d’un magicbuilding / de lire tout ce qui précède, pourquoi ne pas utiliser une œuvre existante et créer votre système de magie à partir de là ? Souvenez-vous que copier une personne, c’est du plagiat, mais qu’en copier deux ou plus, c’est de la recherche  😀 Par exemple, quand Croc a conçu le jeu de rôle Bloodlust, il a créé les deux sources principales de pouvoirs surnaturels de son univers en mélangeant le cycle d’Elric de Michael Moorcock (il n’y a pas simplement deux épées d’origine démoniaque aux énormes pouvoirs mais des milliers d’armes diverses d’origine divine) et l’épice de Dune (sauf qu’ici, il y a plusieurs sortes d’épices aux propriétés différentes). Et plus généralement, il a recyclé les oeuvres de deux autres écrivains de SFF fameux (Howard et Aldiss) pour son worldbuilding.

Si vous êtes en panne d’inspiration ou voulez bâtir « sur un coin de table » un magicbuilding « en urgence » ou sans trop vous racler la soupière, il vous suffit donc de prendre deux oeuvres connues (voire plus), de les mélanger et/ou leur faire subir un changement de perspective, et avec un peu d’astuce, le tour sera joué. Vous pouvez transformer un contexte de SF (ou de comics) en fantasy, mélanger deux magicbuilding de Fantasy en un seul, voire même vous inspirer de tout autre chose que la SFFF (ou bien de la SFFF papier : une série ou un film peut faire l’affaire), qui sait. Histoire de donner un exemple, voyons comment combiner simplement Dune, Skyrim et House of the Dragon : dans l’univers du jeu de rôle / roman (issu de mon imagination fertile) House of the Wyrm, les dragons secrètent une substance qui, si elle est ingérée régulièrement, confère à certains individus, appelés Enfants de Dragons, des pouvoirs magiques dérivés de ceux des terribles reptiles : voler, cracher le feu, et ainsi de suite. Malgré ce que suggère le nom, ce don n’est pas génétique (deux Enfants de dragons s’accouplant n’en produiront pas un autre) mais semble lié à des configurations astrales multiples, rares et que nul n’a jusqu’ici pu identifier. Le problème est que les dragons sont rares, et qu’ils ne produisent la précieuse substance qu’en période de rut (rare) ou lors de leur maturation (encore plus rare, du fait du faible nombre de naissances). La possession de dragons et de quantités appréciables de la substance structure donc la géopolitique de cet univers, comme celle de pétrole et d’armes évoluées conditionne celle de notre Terre.

Comme vous le voyez, il est aisé de combiner quelques références, et avec un soupçon de logique et un doigt d’inventivité, les idées émergent toutes seules de la combinaison !

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37 réflexions au sujet de « The A(pophis)-Files – épisode 12 : It’s a kind of magic * – le Magicbuilding »

  1. Bonjour; une bonne chose de vous retrouver sur votre blog « Le culte d’Apophis » … (vous êtes ma référence dans le domaine SF 🙂 ) Mais avant tout, je tiens à vous souhaiter une bonne santé et tout plein de bonnes choses à vivre pour 2025.

    Bien cordialement

    Christian Hellou

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  2. Quel plaisir de te lire à nouveau et au détour d’une phrase découvrir un nouvel auteur. Cela étant cela fait 5 minutes que je répète en gloussant “ANKOU CAILLE LA BATAILLE”. 😂

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  3. Je ne suis pas une bâtisseuse d’univers mais juste une arpenteuse alors je suis ravie de retrouver ta plume éclairée et j’espère qu’elle nous reviendra en force pour continuer à nous faire découvrir avec moult détails de riches univers.
    Très belle année à toi Apophis et bon retour parmi nous 🙂

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  4. Bonjour, Apophis

    Fort agréable de vous lire de nouveau. Heureux de votre Retour. Et de surcroît, pour un article de classe.

    Que la MAGIE soit avec vous.

    Mes meilleurs voeux, quoique tardifs, pour la nouvelle année.

    En attendant de lire la suite du Panthéon Apophien, après 2001 et votre roman.

    Bonne santé et Au Revoir

    Mohamed Ben d’Alger.

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  5. J’ai pris beaucoup de plaisir (et de temps) à lire cet article. Riche, documenté, engageant. Je me sens mieux préparer pour appréhender mes lectures. Encore une fois la demonstration que ton blog est d’une richesse et d’une pédagogie bien supérieure à tout ce que l’on trouve ailleurs. Je suis fan. Merci !

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  6. Mais une magie dont le fonctionnement est parfaitement explicité ne devient-elle pas une science ?

    Dans Les maîtres enlumineurs, c’est clairement le cas ! La magie est devenue une véritable science. Et ce n’est pas un problème ! Mais elle perd alors, en quelque sorte, sa magie (au sens premier, celui d’une chose mystérieuse et inexplicable).

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    1. Pas forcément. Il ne faut pas confondre cohérence et rationalité. Après, un phénomène peut avoir l’apparence de la magie mais être en fait explicable par la science (cf. Waldo d’Heinlein, les conceptions de Clarke ou Le Dernier des aînés d’Adrian Tchaikovsky).

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  7. Tu m’embrouilles !

    Je passe au tutoiement après avoir relu la page Bienvenue ! (il me semblait bien avoir lu, un jour, quelque chose à ce sujet !).

    Je pense que c’est d’abord une question de point de vue, ou de définition puis, en dernière analyse, de sentiments !

    Vu de mon fauteuil, la magie des enlumineurs est magique (puisque sont décrits des phénomènes qui ne sont pas permis par les lois (physiques) qui régissent notre monde). Le système m’apparaît comme cohérent mais pas rationnel.

    En revanche, si je me place dans le contexte de l’œuvre (mettons que j’habite à Tevanne, pour rester sur cet exemple) alors la magie est bien une science, la même expérience produisant les mêmes effets. Le système est cohérent et rationnel.

    Dit comme ça, cela semble évident et sans intérêt, mais là où ça m’importe, c’est qu’en fonction de ça, les registres émotionnels convoqués ne sont pas les mêmes (en tout cas pour moi). Mon état d’esprit n’est pas le même selon que je me lance dans un roman de high fantasy ou cyberpunk. D’ailleurs, c’est souvent mon état d’esprit qui dicte mes lectures (je ne pourrai pas, par exemple, me tenir strictement à un planning de lecture).

    PS : Dans le cadre de phénomènes inexpliqués, ils ne peuvent pas être catégorisés, par définition. On peut croire qu’ils relèvent de la magie ou croire qu’il doit y avoir une explication mais on reste dans l’incertitude.

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    1. N’ayant pas encore lu le troisième tome des Maîtres enlumineurs (ce sera fait dans les mois qui viennent), j’aurai du mal à apporter une réponse définitive au débat (à suivre, donc), mais en revanche, dans cet exemple précis, il me paraît important de préciser que conceptuellement parlant, c’est de la Fantasy ET du cyberpunk, ou plutôt une transposition de bien des codes ou éléments emblématiques du second dans la première.

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      1. Nous sommes d’accord, et c’est d’ailleurs ce qui fait une grande partie de son intérêt.

        Moi qui suis plus adepte de Fantasy que de SF, je regrette souvent que les auteurs de Fantasy ne s’emparent pas davantage de toutes ces thématiques qui font la richesse de la SF (mais sans doute que je ne lis pas les bons auteurs…).

        Et, parce qu’il faut bien rendre à César ce qui lui appartient, j’avoue que c’est toi qui me l’as fait découvrir.

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        1. Il y a une certaine tendance à un recyclage accru de marqueurs SF en Fantasy (anglo-saxonne, du moins) ces dernières années : voyage dans le temps (je me suis d’ailleurs aperçu que le Jeu de rôle avait exploité cet aspect il y a… 35 ans, étant dès lors très nettement précurseur par rapport aux romans de Fantasy), OVNIs, Lois de la Robotique d’Asimov appliquées à autre chose que des robots, etc. J’en parle dans la deuxième édition de mon livre.

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