La Rage des dragons – Evan Winter

Maximus Africanus

Le 8 octobre 2025, paraîtra La Rage des dragons d’Evan Winter, premier tome d’un cycle inspiré aussi bien par Game of thrones (peu), le Gladiator de Ridley Scott (beaucoup) et surtout par la culture Xhosa dont est originaire l’auteur. J’ai, pour ma part, lu ce livre en VO en 2019, et j’ai, à l’époque, été très impressionné par sa qualité (surtout sachant qu’il s’agit d’un premier roman), et peut-être surtout par la capacité de l’écriture de Winter à vous immerger dans son monde et son intrigue et à vous faire vivre des scènes d’une puissance peu commune, qu’elle soit épique, dramatique ou émotionnelle. J’ajoute que outre son cadre d’inspiration africaine MAIS dans un monde secondaire (imaginaire) qui ne court pas précisément les rues, La Rage des dragons est à l’avant-garde de ces romans qui, depuis quelques années, recyclent massivement des tropes SF (ce qui n’est pas spécialement original, à la base) mais qui choisissent ceux que, précisément, on avait peu l’habitude de voir en Fantasy : ici, c’est l’aspect temporel qui est concerné. Je n’en dirai guère plus, vous laissant le plaisir de la découverte, sinon pour vous préciser que cette « Fantasy temporelle » en émergence concerne d’autres romans anglo-saxons récents et même quelques romans francophones (ne les ayant pas lus personnellement, je me garderai toutefois de citer ces derniers). Ceux qui sont intéressés par le sujet pourront se référer à ce tag qui vous donnera quelques exemples de ce domaine littéraire.

Si vous voulez en savoir plus sur La Rage des dragons, je vous invite à lire ma critique très détaillée de la VO. J’insisterai sur l’originalité de la chose (aspect temporel et africain dans un monde secondaire), sur le fait que si, au début, ce roman semble stéréotypé, il ne l’est pas du tout, l’auteur ayant tendance à subvertir les poncifs, sur le fait que l’extrême violence guerrière de ce qui est narré ne saurait réduire l’ouvrage à cela, son fond étant thématiquement extrêmement riche (colonialisme, militarisme, système de caste, oligarchie, absurdité d’une guerre de positions se prolongeant depuis des siècles, place d’un objecteur de conscience dans une société centrée uniquement autour de la valeur au combat, défis affrontés par celle-ci lorsqu’elle entrevoit un espoir de paix qui changera à jamais ses fondamentaux – pays à une seule culture, une seule ethnie, monothéiste, etc.) ET plus nuancé que ne l’est, en général, l’afro-SFF. Ici, c’est le pseudo-Xhosa le colonisateur !

Bref, je ne saurais trop vous conseiller de lire, non, pardon, de vous ruer sur ce roman qui, assez étrangement, débarque pourtant dans la langue de Molière sans tambour ni trompette. Si vous accordez quelque crédit à mon jugement, je le dis haut et fort : voici une des sorties de cette rentrée, voire même LA sortie. Moins survendue que certaines autres, et pourtant d’une tout autre valeur. Winter is coming !

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15 réflexions au sujet de « La Rage des dragons – Evan Winter »

  1. Effectivement, je n’en avais pas du tout entendu parler avant ton article, et surtout, je trouve encore plus surprenant qu’il sorte tant d’années plus tard… Merci pour la mise en avant car cette inspiration africaine m’intrigue et m’attire.

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    1. Une maison d’édition française que je ne citerai pas (pas la même que celle qui va publier La Rage des dragons en octobre) a tenté de contacter l’agent de l’auteur quelque temps après la sortie « pro » de la VO (le roman était sorti en auto-édité auparavant et le succès a été tel qu’il a ensuite été réédité dans le circuit traditionnel anglo-saxon), sans jamais recevoir (à ma connaissance) de réponse. Ceci expliquant sans doute en partie cela.

      De plus, ce genre de délai est bien plus fréquent qu’on ne le pense en général, et pas pour de petits romans, loin de là. Là, spontanément, sans réfléchir, les noms de L’épée brisée de Poul Anderson ou de La maison des soleils d’Alastair Reynolds me viennent en tête, mais on pourrait citer nombre d’autres exemples. Parfois, certains romans pourtant de grande qualité passent sous les radars, d’autres fois, le blocage est tout bonnement dû au fait que la ou les maisons qui pourraient traduire les livres concernés ont décidé, pour diverses raisons, que le projet n’aboutirait pas (pas rentable / trop risqué – les goûts des lecteurs anglo-saxons ne correspondent pas toujours aux nôtres – , inimitié envers les idées de l’auteur ou sa personne, incapacité à se décider à lancer le projet toujours remis aux calendes grecques en faveur d’autres sorties jugées plus « prioritaires », etc.). « On » (ils se reconnaîtront) m’a parlé de certains projets de traduction il y a littéralement des années, ils n’ont pas encore abouti, et pour certains, j’ai de gros doutes sur le fait qu’ils aboutissent un jour.

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      1. Merci pour ces détails sur les coulisses. C’est vrai qu’en tant que lecteurs lambda, on n’imagine pas tout ça mais il y a une vie énorme derrière chaque projet . J’afore découvrir ce genre d’infos et serais tres curieuse (ou pas si ça n’aboutit pas) de découvrir ces romans annoncés il y a longtemps mais toujours pas sortis. Ça en fait un de moins au moins ^^

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  2. Cher Apo, je suis ravie de voir un article sur ta page. J’étais venue sur ton blog et j’ai constatée que tu publier de manière irrégulière. Forcément, sachant que tu as des soucis de santé, je suis quelque peu inquiète. Sans être totalement rassurée, cela fait plaisir – et même cela me procure un réconfort – de lire un nouvel article.

    La fantasy emprunte à la SF comme celle-ci l’avait fait antérieurement, j’apprécie beaucoup ces choix, qui nous offrent des romans avec une sensation novatrice (même si les concepts ne le sont pas), plus de profondeur, et surtout bien moins de sensations de redite.

    Je me note le titre comme un incontournable.

    Merci

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    1. Amie Lutin, je suis également content de te voir de retour, et de constater qu’Albédo publie un flot de nouveaux articles. Ta voix manquait beaucoup à la blogosphère, de mon point de vue et de celui de nombreuses autres personnes. Merci pour ton passage et ton message, qui me réchauffent le cœur !

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  3. Salut Apophis ! Comment vas tu ? Je me permets ce premier post et premier commentaire pour digresser un peu.

    J’ai fait les choses à l’envers et t’ait d’abord découvert via ton guide que j’ai acheté et dévoré avec grand plaisir. J’ai le même intérêt que toi pour les genres et sous genres liés à l’imaginaire, lisant tout ouvrage de référence et guide que je trouve sur le sujet, ton guide fut donc une vraie pépité, le genre de livres/d’essais/de guidess que je cherchais depuis longtemps.

    Pour la Rage des Dragons, je suis ravi qu’il sorte en français, j’avais commencé à le lire en anglais mais j’avais un peu de mal, donc je suis content qu’il soit ENFIN traduit !

    J’ai entendu que tu avais pas mal de problèmes de santé, je te souhaite que ça aille mieux et t’envoie force et courage pour que tu t’en remettes.

    Je ne sais pas si tu as prévu d’autres articles de fond ou d’autres guides de lecture que je lis avec grand plaisir, peut être que le format t’intéresse moins ou te demande une surcharge mentale que tu n’as pas envie de « t’infliger » actuellement. Je me languis notamment du guide sur le water opera, ou d’autres Apophis Files ! En tout cas, tu as gagné un nouveau lecteur (même si je te lis depuis un moment) et j’apprécie beaucoup ta prose et ton travail de défricheur de l’imaginaire.

    Bon courage à toi et toujours ravi de te lire !

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  4. Une vraie réussite. C’est tellement immersif que j’ai l’impression de l’avoir lu en apnée. Le système de magie est assez sympa avec ces soldats transformé en Ken le survivant. De plus, le worldbuilding est nettement moins monolithique que je le craignais avec un système de classe sociale. Je l’ai lu juste après La grande muraille de Mars (éblouissant) et je plains le bouquin qui va suivre !

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  5. J’ai un avis mitigé. Le bouquin fonctionne très bien, surtout après le premier tiers et l’arrivée de Tau à l’académie des déclassés. Je me suis mis à tourner les pages de plus en plus vite, sans doute parce que ça avait un petit côté Stratégie Enders sur la plage. Je lirai la suite avec plaisir.

    Cela dit, je n’ai jamais pu me débarrasser du malaise initial : un peuple élu qui commet un génocide pour prendre possession des lieux. Je sais bien que tout l’arc narratif est tendu vers la déconstruction de cette domination, mais c’est une expérience de lecteur un peu éprouvante que de souhaiter leur défaite à tous.

    Et puis Tau, à la longue, devient encombrant tellement il stagne dans les eaux de la vengeance. Là aussi c’est clairement voulu, mais j’avoue avoir roulé des yeux quand (spoiler) Jayyed, infiniment plus intéressant, disparaît, bien trop prématurément, tel un Mercutio qui se sacrifie au troisième acte et qui nous laisse sur les bras sa pâie copie (aka ce bellâtre de Roméo).

    Bref, un roman où rien ni personne, et encore moins le lecteur, n’est tout à fait à sa place. Stimulant et un peu dérangeant.

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