L’œil d’Apophis – Numéro 6

Eye_of_ApophisSixième numéro de la série d’articles l’œil d’Apophis (car rien n’échappe à…) ! Je vous en rappelle le principe : il s’agit d’une courte présentation (pas une critique complète) de romans qui, pour une raison ou une autre, sont passés « sous le radar » des amateurs de SFFF, qui sont sortis il y a longtemps et ont été oubliés, qui n’ont pas été régulièrement réédités, ont été sous-estimés, mal promus par leur éditeur, ont été noyés dans une grosse vague de nouveautés, font partie de sous-genres mal-aimés et pas du tout dans l’air du temps, et j’en passe. Chaque numéro vous présente trois romans : aujourd’hui, il s’agit de L’échelle de Darwin de Greg Bear, Palimpseste de Charles Stross et La plage de verre de Iain Banks.

Au passage, sachez que vous pouvez retrouver les anciens numéros de l’œil via ce tag ou bien cette toute nouvelle page. Je vous rappelle aussi que les romans présentés ici ne sont pas automatiquement des chefs-d’oeuvre ou ceux recommandés par le site à n’importe quel amateur de SFFF (si c’est ce que vous cherchez, voyez plutôt le tag  (Roman) Culte d’Apophis).

L’échelle de Darwin – Greg Bear

darwin_bearL’échelle de Darwin est le premier roman d’un diptyque (la seconde partie s’appelle Les enfants de Darwin) écrit par Greg Bear, et relevant de la SF biologique (celle centrée sur cette science plutôt que sur la physique). Il confronte le monde (quasi-actuel) à différents mystères, qui se révéleront en fait liés : d’une part une « épidémie » de fausses-couches au niveau mondial, d’autre part la découverte de charniers marquant un ancien génocide (et le terme a rarement été plus approprié…), et enfin celle de cadavres de Néandertaliens, dont une femme enceinte. Et la rumeur de l’apparition de bébés étranges, qui ne semblent pas humains…

Même s’il n’a pas que des qualités, ce livre aborde quelque chose qui est le plus souvent délaissé par la SF qui s’intéresse à l’avenir de l’homme sous un angle transhumaniste. Je ne vais pas dévoiler de quoi il s’agit, mais disons qu’à part les romans / comics traitant de Mutants / télépathes apparaissant dans la population générale, peu d’œuvres abordent ce thème, alors qu’il s’agit d’une question fondamentale que chacun d’entre nous pourrait se poser. Ce qui est intéressant, également, est que c’est vu à hauteur d’homme, ou plutôt de femme dans ce cas-là : une des protagonistes se retrouve enceinte, mais de quoi, exactement ? A quoi va ressembler l’enfant ? Va-t-il survivre ?

Notez que le second roman, lui, s’intéresse « au monde d’après », et à la façon dont les, hum, nouveaux enfants s’intègrent (ou pas) à la société, hum, humaine.

Palimpseste – Charles Stross

palimpseste_strossSi vous avez la curiosité de lire les avis sur Palimpseste, roman court de Charles Stross, sur des plates-formes aussi diverses que Babelio ou les sites marchands, vous en viendrez à la conclusion que ce texte est confus et sans grand intérêt. Dans les deux cas, vous feriez une énorme erreur. Cette novella n’est pas confuse, elle est exigeante (c’est très différent…), encore que bien moins que certains ne veulent le faire croire, et d’autre part, j’ai très rarement vu une histoire d’une ambition, d’un sense of wonder, aussi démesurés. Le cœur de l’intrigue est en effet constitué par les efforts d’une organisation disons… trans-temporelle pour sauver le monde, l’homme et la civilisation de l’extinction ou de la destruction… à tout prix. Même celui de… j’allais dire trafiquer, mais non, pas de bricolage ici, plutôt de l’industrie lourde, de modifier, donc, que ce soit la ligne temporelle ou l’architecture du système solaire tout entier ! (les étoiles, c’est pourri, vive le nécrosoleil !).

Donc non seulement Palimpseste n’est ni mauvais, ni hautement dispensable, mais c’est tout le contraire : c’est un texte brillant que n’importe quel amateur de SFFF devrait lire. Sachant que oui, c’est vrai, il est parfois exigeant. Mais c’est le cas de toutes les grandes œuvres, non ?

La plage de verre – Iain M. Banks

plage_de_verre_banksAutre roman souvent malmené par la critique : La plage de verre, de Iain M. Banks. Mais d’abord, quelques mots sur l’auteur : Banks était un écrivain écossais, récemment décédé (beaucoup trop tôt, hélas), qui a mené avec succès deux carrières en parallèle, une en littérature générale (sous le nom de Iain Banks, sans le « M » de son deuxième prénom, Menzies), et une SF (sous l’étiquette Iain M. Banks). Et même au sein de ce dernier volet de sa bibliographie, existe une seconde dichotomie : d’une part son cycle phare, celui de la Culture (qu’on se le dise, cette saga est in-con-tour-na-ble en SF, autant qu’Hypérion de Dan Simmons, à mon sens, même si dans un style profondément différent), et d’autre part des romans SF mais qui ne sont pas rattachés à la Culture (outre celui dont nous parlons aujourd’hui, citons L’algébriste ou Transition). Globalement, les premiers ont une réputation incomparablement supérieure aux seconds, certains étant même assez malmenés (L’algébriste, notamment).

Vous serez donc éventuellement susceptible de lire que La plage de verre est insipide, mauvais, ou au mieux qu’il a du potentiel, mais qu’il a été mal exploité par l’auteur. Je trouve ces commentaires exagérés, voire pour certains fantaisistes, mais il faut tout de même reconnaître qu’on est assez loin de ces chefs-d’oeuvre que sont les tomes de la Culture. Pour autant, si ce roman palit de la comparaison, est-il mauvais ? Certainement pas ! Le monde est très original (un système solaire isolé dérivant dans l’espace intergalactique), la fin poignante, et puis c’est du Banks, bordel ! Même un mauvais, ou disons ici, perfectible bouquin de cet auteur dépasse largement la production passée, présente ou probablement à venir en SF. Bref, je ne pense pas que ce livre méritait de finir dans l’oubli et un certain mépris, d’où le fait que je vous incite à le découvrir (ou le redécouvrir, pourquoi pas) sans a-priori. Et même si vous ne l’aimiez pas, lisez la saga de la Culture, si j’avais UN cycle en SF à recommander, ce serait sans hésitation celui-là !

 

31 réflexions sur “L’œil d’Apophis – Numéro 6

  1. Ah ben dis donc, ce sont quand même trois poids lourds que tu nous suggères là, et je suis d’accord qu’aucun de ces livres ne mérite l’oubli ou le mépris. Et je dirais même plus : bien au contraire. Notamment Palimpseste qui est à mon sens une perle rare de haute valeur.

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  2. Bien le bonjour noble lecteur,
    Une fois encore vous avez raison et votre parole est juste autant que lucide, merci pour ses œuvres dévalorisées qui sont pourtant fort singulières.
    Que le silence des mondes vous accompagne.
    Amicalement vôtre.
    L.

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  3. Ah! je vois que j’ai eu le nez en veine : J’ai 2 des romans dans ma PAL et l’autre dans ma wish. Il s’agit du Stross que tu m’avais déjà recommander… donc dans la wish.
    Le Bear et le Banks me tentent vraiment, notamment le Banks en attendant de lire la Culture, car finalement, je me dis que pour l’apprécier vraiment, il faut sans doute que je ne cherche pas (volontairement ou pas) à le comparer à son cycle phare!
    C’est une bonne idée cette nouvelle page!
    Merci encore de ces petites perles que tu nous dégotes!

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  4. Comme toujours « l’œil d’Apophis » est riche de conseils appétissants…Bear bien sûr, mais surtout Banks qui m’attire toujours autant et que je ne sais toujours pas par où aborder…
    « Palimpseste » fut l’objet de l’une de mes première chroniques (que je viens de relire et qui mériterait une bonne séance de réécriture) et m’a réellement plus, me laissant sur un très fort goût de « reviens-y ». Exigent, dense… Je me demandais justement il y a quelques semaines ce qu’en aurait fait un autre éditeur, genre…tiens le Bélial, par exemple, dans sa collection une heure lumière. L’accueil aurait peux être été identique, mais assurément pas la sortie dans un quasi-anonymat. Bien sûr, cette réflexion de refera pas l’histoire…

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    • C’est marrant, j’ai eu la même réflexion, à savoir que Palimpseste était un « Une heure-lumière » avant l’heure (^^).

      Concernant Banks, j’aurais tendance à te conseiller de lire le cycle de la Culture d’abord, et le reste de son oeuvre ensuite. Et d’aborder le cycle par L’homme des jeux qui reste, pour moi, l’introduction la plus facile à l’univers de la Culture, avant de poursuivre par L’usage des armes puis Une forme de guerre. Et après ça, dans l’ordre de parution : Excession, puis Le sens du vent, puis Trames, Les enfers virtuels et enfin La sonate hydrogène. Sachant que tu peux lire L’essence de l’art et Inversions un peu quand tu veux après avoir lu L’homme des jeux.

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    • Il n’y a pas de raison. Tu lis pas mal de livres que je n’ai pas eu l’occasion de lire, et de mon côté je lis ou j’ai lu certains romans que tu n’as pas encore pu lire. Donc je suis autant en marge et à la bourre que toi ^^

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  5. Ping : L’œil d’Apophis – Numéro 9 | Le culte d'Apophis

  6. Charles Stross je connaissais le nom, mais pas ses livres, que je découvre vraiment par ton blog. J’ai vu que tu avais conseillé de commencer par celui-là plutôt qu’Accelerando, qui est visiblement un pavé colossal d’une grande complexité, c’est pourquoi ce Palimpseste sera ma prochaine lecture. 🙂

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  7. Je suis content d’avoir lu ce livre et j’ai aimé cette sensation d’être complètement lâché dans les étoiles. Par contre je pense qu’il aurait été encore meilleur s’il avait été plus long, par exemple 400 ou 500 pages, je me dis même qu’il aurait été possible de faire plusieurs tomes à partir de cet univers. Je n’ai pas forcément tout compris à 100% (les passages de description des astres et de l’espace) mais je creuserai plus dans l’oeuvre de cet auteur! 🙂

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  8. Ping : Guide de lecture SFFF – Découvrir le (ou progresser en) Planet Opera | Le culte d'Apophis

  9. WOW, le cycle de la culture serait LE cycle de la SF 😮
    Même si lire cela me fais plaisir, ce cycle étant mon préféré parmi ceux que j’ai pu lire jusqu’à aujourd’hui. Je suis étonné que ce soit celui là et pas Dune (même si un poil surcoté à mon avis), la fondation, les robots, Polity, Hypérion et tant d’autre !
    En parcourant ce blog je n’aurais pas mis ma pièce sur celui là en tout cas (même si la présence d’un guide de lecture aurait dû me mettre la puce à l’or(t)eille).

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    • Non, justement, ce n’est pas LE cycle incontournable, mais UN des cycles incontournables, autant qu’Hypérion, comme c’est précisé dans l’entrée à laquelle tu fais référence, ou d’autres effectivement, dont oui, Fondation, Polity, Pandore chez Hamilton, etc.

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      • J’ai été induit en erreur par cette phrase: « Et même si vous ne l’aimiez pas, lisez la saga de la Culture, si j’avais UN cycle en SF à recommander, ce serait sans hésitation celui-là ! »
        Enfin je me suis plutôt mal exprimer en fait

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        • L’esprit de la phrase était « Si on me forçait à en choisir un seul, je choisirais celui-là ». Pourquoi ? Parce que les livres qui le composent sont suffisamment divers, en terme d’atmosphère, de ton, de thématiques, etc, pour que, selon moi, quasiment n’importe quel profil de lecteur y trouve son compte. Ce qui n’est pas le cas de Polity, Pandore, Hypérion, etc. En plus, l’avantage du cycle de la Culture, c’est qu’il est beaucoup moins monolithique que les autres : même si je ne suis pas tout à fait d’accord avec ça, comme je l’ai expliqué dans mon guide de lecture dédié, tu pourrais théoriquement le prendre un peu par n’importe quel bout, lire les livres dans le désordre, etc. Tu ne peux pas faire ça avec Pandore, Polity, Hypérion, Fondation, etc. Donc là aussi, ça en fait, pour moi, un cycle plus « universaliste », donc recommandable à un plus grand pourcentage de personnes, que les autres. Même si pour un débutant, je recommanderais plutôt Fondation. Même si en terme de qualité littéraire, Hypérion est au-dessus. Même si mes goûts personnels, orientés Hard SF et SF militaire, m’orienteraient plutôt vers Polity. Même si en terme de construction d’intrigue, de personnages, de monde, Pandore est au-dessus. J’espère que tu comprends mieux le sens de ma déclaration, du coup.

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  10. Ping : Panthéon Apophien – épisode 5 | Le culte d'Apophis

  11. Ping : One day all this will be yours – Adrian Tchaikovsky | Le culte d'Apophis

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