LE chef-d’oeuvre de la SF, et plus généralement un grand roman, tout simplement
Je précise que je ne parle ici que du premier tome du cycle, pas des trois autres (La chute d’Hypérion, Endymion et l’Eveil d’Endymion). Il s’agit pour moi, sans le moindre doute, du plus grand chef-d’oeuvre de l’histoire de la SF. Pourquoi ? Parce que ce roman est arrivé à mêler le meilleur du « Sense of Wonder » de la SF, à évoquer l’intégralité de ses thèmes majeurs, ET à conter tout ça avec une plume d’une qualité proprement extraordinaire, notamment sur le plan du style (ou plutôt DES styles), faisant de lui, bien au-delà des frontières de la SF, un grand roman, tout simplement.
L’éventail des thèmes balayé par le roman est tout bonnement fabuleux. Au moment de sa sortie, Roland C. Wagner avait écrit qu’il constituait un véritable catalogue, en forme d’hommage, de TOUT ce qui avait pu être écrit (de majeur) avant lui. C’est vrai (les passages dans le cyberespace, notamment, ont un fort parfum Gibsonien, d’ailleurs totalement assumé par l’auteur, en forme d’hommage), mais il ne faudrait pas réduire Hypérion à cela.
Oui, certains thèmes SF traités ne sont pas neufs, mais en revanche la manière de les traiter est souvent différente. J’en veux pour preuve tout ce qui concerne les voyages dans le temps, des Tombeaux du Temps à la Maladie de Merlin de Rachel. Ou comment faire du complètement neuf avec du vieux. Chapeau bas. De même, Dan Simmons n’a pas inventé les IA en SF, mais en revanche personne (ou peut-être seulement Banks et Westerfeld) n’a été capable depuis d’en faire de si crédibles et intéressantes. Le Technocentre, bien loin du risible Skynet, reste pour moi, et, j’en suis certain, de nombreux autres, la référence ultime en matière d’IA manipulatrice.
Toujours sur un plan SF, quelle vision incroyable, quel Sense of Wonder époustouflant ! Des Labyrinthes aux maisons dont chacune des pièces se trouve sur une planète différente et auxquelles on accède via des Portes semblables à des trous de ver permanents, des vaisseaux-arbres au Gritche, on en prend plein les yeux. Je trouve d’ailleurs incroyable qu’il ait fallu attendre cet été pour que soit réellement lancée l’adaptation (tv) de ce roman, tant les images époustouflantes qu’il fait naître sont, d’évidence, taillées pour un écran, qu’il soit de cinéma ou de télévision. J’ai toujours eu du mal avec ce que j’appellerais la SF « intimiste », celle qui ne tire pas parti de toutes les merveilles qu’un genre avant tout basé sur la high-tech et l’exploration spatiale permet, et Hypérion constitue un contre-exemple flagrant à cette SF dont le cadre et les images qu’elle fait naître sont délibérément « à petit budget ».
Hypérion ne constitue pas seulement une merveille de la SF, c’est aussi un exploit littéraire absolument sidérant. Le cœur de la narration de ce premier tome du cycle est constitué par les récits de six des sept pèlerins qui se rendent sur ladite planète Hypérion. Le tour de force de Dan Simmons (qui a, depuis, prouvé qu’il pouvait être à l’aise et intéressant dans des genres très variés, un peu comme Banks que j’évoquais plus haut, d’ailleurs), est d’avoir conté chacune des six histoires avec autant de styles, de tons et de rythmes complètement différents, donnant à chacun des six personnages une voix reconnaissable et complètement distincte. On a l’impression que six écrivains différents se sont réunis pour conter chacune des six histoires, mais pourtant il n’y en avait bel et bien qu’un seul : Simmons. Les six récits balayent ainsi des tons, un rythme et des styles / thèmes très divers, du polar au religieux, du calme au furieux, du policé à l’outrancier, du sexuel au familial. Deux d’entre eux, celui de Sol Weintraub et celui du Consul, se détachent particulièrement, grâce à l’extraordinaire émotion qu’ils dégagent. Le récit de Sol est un déchirement, le récit du calvaire d’un homme accablé par la peine et la fatalité, qui ne pourra qu’émouvoir n’importe quel lecteur ou lectrice.
En résumé
Un extraordinaire roman, de SF d’abord mais aussi et surtout de littérature tout court, un incontournable, à lire impérativement pour toute personne se considérant comme un amateur de SF.
Pour aller plus loin
Si vous souhaitez avoir un deuxième avis sur ce roman, je vous conseille de lire les critiques suivantes : celle de Xapur (en deux parties : là et là), celle de Célindanaé sur Au Pays des Cave Trolls, de Vert sur Nevertwhere, de Lutin sur Albedo, d’Aelinel, de Tachan,
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Après Endymion, tu pourras lire la suite Les orphelins de l’Hélice, ici : http://medias.lemonde.fr/medias/obj_multi/helice.pdf
Il s’agit d’une nouvelle.
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Elle est intégrée à une anthologie appelée Horizons Lointains, réalisée sous la direction de Silverberg. De mémoire, j’ai du la lire il y a plus de dix ans. Mais c’est bon à savoir pour les autres, surtout qu’il s’agit d’un excellent texte 🙂 Et pour ce qui est d’Endymion, je l’ai lu (comme chaque livre des Cantos) à sa sortie, chez Ailleurs & Demain.
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Je viens de le lire et je ne peux qu’approuver ta chronique (très bien faite d’ailleurs comme toujours). C’est vraiment un livre fabuleux et un gros coup de cœur pour moi.
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Merci 🙂
ça a été un gros coup de cœur pour moi aussi, mais il a eu un effet pervers, à vrai dire : je l’ai lu à sa sortie française, au début des années 90, et il a établi de tels standards de qualité que tout ou quasiment m’a paru fade après lui 😀 Comment lire de la SF « normale » après un tel déchaînement d’émotions, de visions ?
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Je comprends car c’est vrai que la barre est haut placée. Tu as lu les suites?
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Oui, j’ai lu l’intégralité du cycle (Hypérion + La chute d’Hypérion + Endymion + L’éveil d’Endymion + Les orphelins de l’Hélice).
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Tu ne les as pas chroniqué sur le blog?
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Non, je les ai lus il y a 20 à 25 ans, et je n’aime pas faire des critiques « de mémoire » » (il n’y en a qu’une poignée de ce type sur le blog), j’ai toujours l’impression d’oublier des tas de points importants. D’ailleurs, celle-ci n’a été réalisée que sur l’insistance de Renaud, qui trouvait que les critiques disponibles sur Amazon ne rendaient pas vraiment justice à Hypérion, et qui m’a incité à en faire une (copiée ici lorsque le blog a été ouvert).
D’ailleurs, j’en profite pour parler d’un projet qui commence à prendre forme dans mon esprit, mais qui concrètement, ne se réalisera probablement pas avant 2019 : les critiques « Reloaded ». En clair, une refonte complète, après relecture en bonne et due forme du bouquin concerné, de la critique x ou y qui ne correspond pas aux standards de qualité / exhaustivité établis depuis l’ouverture du blog. Ça concernera en priorité des titres comme Hypérion, le premier volume de la Trilogie de l’Empire de Feist / Wurts, le cycle Rigante, bref tout ce qui me fait saigner les yeux lorsque je contemple ce qui, pour moi, est indigne, en l’état, du travail que je propose aujourd’hui sur le blog.
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Rassures toi elle est déjà super cette critique 🙂
Beau projet en tout cas mais qui demande certainement beaucoup de temps.
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Concernant Hyperion, as-tu une belle édition à me conseiller (c’est pour offrir à un fan de Simmons : un brave homme!) je n’ai pas trouvé beaucoup de rééditions à part la dernière chez Robert Laffont Ailleurs et Demain de Septembre 2022?
Merci encore Apophis.
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Je vais avoir du mal à te conseiller une « belle » édition, vu que de mon point de vue, en VF, il… n’y en a pas :
https://www.noosfere.org/livres/EditionsLivre.asp?numitem=1945
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Ok merci pour la recherche.
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